Une forme de guerre

Une forme de guerre
Titre original (en) Consider Phlebas
Format Roman
Partie de Cycle de La Culture (en)
Langue Anglais
Auteur Iain Banks
Genre Science-fiction
Sujet Théorie du grand homme
Date de création 1987
Pays Royaume-Uni
Séquence
Univers La Culture
Série Cycle de La Culture (en)
L'Homme des jeux

Une forme de guerre (titre original : Consider Phlebas) est un roman de science-fiction écrit par l'auteur écossais Iain M. Banks, et publié en 1987. Ce roman constitue le premier tome du Cycle de la Culture.

Sur le fond d'une guerre intergalactique qui oppose la race des Idirans aux humanoïdes de la Culture, le roman évoque un vaisseau de la Culture qui s'autodétruit pour échapper à une interception ennemie. Les derniers signaux émis par le vaisseau laissent penser que, poussé par la nécessité, l'intelligence artificielle, ou Mental, qui le commandait a découvert une nouvelle technologie lui permettant de se réfugier instantanément sous la surface de la planète Schar. Les Idirans chargent alors Bora Horza Gobuchul, un métamorphe, de s’emparer du supercalculateur, tandis que la Culture envoie un agent pour essayer de l'en empêcher.

Publié en 1987, Une forme de guerre est le premier volume paru du Cycle de la Culture de l'auteur écossais Iain M. Banks. Ce cycle de science-fiction qui regroupait (en juillet 2012) neufs romans et quelques nouvelles décrit le monde de la Culture, une société humanoïde dotée d'une très haute technologie. Si l'univers de la Culture est le fonds commun de tout le cycle, chaque roman peut se lire indépendamment.

Une forme de guerre est paru en France en 1993 avec une préface de Gérard Klein. Le roman se compose formellement d'un prologue, d'un récit divisé en 14 chapitres et d'un appendice qui se présente sous la forme d'une brève encyclopédie de la guerre Idirans-Culture. Les annexes exposent les raisons et le bilan de la guerre qui oppose les deux civilisations, proposent un dramatis personae, qui raconte la vie des personnages qui ont survécu aux événements du récit, et un épilogue.

Style

Une forme de guerre est un space opera qui raconte de manière linéaire et chronologique les aventures du Métamorphe Bora Horza Gobuchul, un espion humanoïde génétiquement modifié à la solde des Idirans. Le récit d'aventures est ponctué de quelques chapitres-bilans où interviennent des personnages de la Culture à la recherche du Métamorphe. Mais la perspective de narration est toujours subjective (en focalisation interne). Les événements sont racontés par le héros du roman et ce que le lecteur apprend de l'univers de la Culture ou des Idirans est toujours raconté par les protagonistes du roman. C'est à l'occasion de longs monologues intérieurs ou de dialogues animés entre les personnages que Iain M. Banks propose au lecteur une réflexion sur la place de l'individu, de la technologie, des valeurs morales et de la mort dans les sociétés technologiquement hyperdéveloppées tout en opposant le fanatisme religieux des Idirans au libéralisme bien pensant de la Culture.

Le développement narratif des aventures du Métamorphe fait quelques emprunts aux ressources traditionnelles de la science-fiction (combats interstellaires, combats terrestres au laser, combinaisons-armures intelligentes, modifications génétiques, matrices intelligentes à la William Gibson, vaisseaux spatiaux géants habitables (comme ceux de l'Anneau-monde, etc.) et à l'univers plus récent du jeu vidéo (pilotage périlleux d'un vaisseau spatial dans un labyrinthe complexe, perte d'une vie pendant une partie de jeu, gain progressif de « points de vie » qui permettent de retrouver un bon état physiologique, etc. ).

Si Une forme de guerre est le premier roman du Cycle de la Culture écrit par Iain M. Banks, la société de la Culture en elle-même y est à peine présentée. Toujours évoquée, mais jamais réellement mise en scène, la Culture semble un peu fantomatique, n'apparaissant - pour y être critiquée - que dans les longues tirades haineuses du héros ou dans les réflexions parsemées de doutes des agents de la Culture.

Résumé

Un vaisseau de la Culture commandé par un Mental - un supercalculateur intelligent et conscient - quitte son unité-usine et se propulse dans l'hyperespace. Construit en pleine guerre Idirans-Culture, l'engin spatial est bientôt piégé par la flotte des Idirans. Le vaisseau s'autodétruit pour éviter toute interception ennemie, mais le Mental qui le commande découvre in extremis une nouvelle technologie lui permettant de quitter l'hyperespace pour se réfugier sous la surface de la planète Schar.

Pendant ce temps, Bora Horza Gobuchul, un Métamorphe au service des Idirans, croupit dans une cellule-égout du Palais-Prison de la planète Sorpen. Démasqué par Pérosteck Balvéda, un agent féminin de la Culture, et condamné par les Gérontocrates de la planète Sorpen à la peine capitale pour avoir assassiné le Ministre de l'Extérieur et pris sa place au gouvernement, le Métamorphe attend son exécution. Mais après une ultime visite du Ministre de la Sécurité et de Pérosteck Balvéda, les Idirans débarquent sur Sorpen, libèrent le Métamorphe et le transportent à bord de leur vaisseau dénommé Main de Dieu 137.

À bord du vaisseau, Xoralundra, un officier idiran, charge Horza d'une nouvelle mission : retrouver un Mental de la Culture qui s'est réfugié sous la surface du Monde de Schar. Soudain, le vaisseau idiran est attaqué par un gigantesque vaisseau de la Culture. L'officier idiran donne à Horza une combinaison de survie et l'expédie dans l'espace en l'assurant que le reste de la flotte viendra le récupérer dès que possible. Mais une fois seul dans l'espace, Horza est arraisonné par un vaisseau pirate. Après sa capture, Horza est contraint de se battre en duel contre l'un des mercenaires de l'espace pour trouver sa place parmi les pirates. Il se fait ensuite enrôler par Krayklin, le chef de la Libre Compagnie de Krayklin, et embarque à bord de la TAC (Turbulence Atmosphérique Claire), le vieil astronef de la compagnie.

Après l'attaque désastreuse du Temple de la Lumière sur la planète Marjoin, l'équipage met le cap sur l'Orbitale Vavatch, une anneau artificiel en rotation créé par la Culture, car Krayklin compte piller un vieux mégavaisseau désaffecté pour y trouver les lasers qui manquent à son astronef. Mais pendant l'exploration du bâtiment, le navire entre en collision avec un gigantesque iceberg. Alors que d'autres mercenaires sont piégés, Horza réussit à s'enfuir à bord de la navette pilotée par Mipp, mais ils font tous deux rapidement naufrage au large d'une petite île perdue au milieu de le mer circulaire de Vavatch. Lorsque Horza s'échoue sur la plage de l'îlot, il est fait prisonnier par les membres de la secte des Mangeurs. Après avoir réussi à empoisonner le gourou de la secte qui lui a mangé un doigt, Horza s'échappe à bord d'une navette de la Culture et rallie la cité astroportuaire d'Évanauth. Il retrouve la trace du chef des mercenaires de la Libre Compagnie en suivant une partie de « Débâcle », un jeu de cartes psychédélique et cruel. À l'issue de la partie, il suit Krayklin sur les docks du port et le tue pour prendre sa place au sein de la Libre Compagnie grâce à ses talents de Métamorphe.

Une fois à bord du vaisseau de la Libre Compagnie, Horza retrouve les survivants de l'équipage et rencontre la dernière recrue de Krayklin qu'il identifie immédiatement comme étant l'agent de la Culture Pérosteck Balvéda. Subodorant l'imminence d'un danger, Horza-Kayklin décide de quitter les hangars de réparation où se trouvait la TAC et de s'envoler sans délai pour la planète Schar. Au loin, l'Orbitale de Vavatch explose, détruite par un gigantesque vaisseau de la Culture afin d'éviter que les Idirans ne fassent de l'Orbitale une base militaire. Au cours du voyage, Horza est contraint par Pérosteck Balvéda d'avouer à tout l'équipage sa véritable identité et les raisons de sa mission sur Schar, la planète des Morts.

Sur Schar, Horza, les membres de la Libre Compagnie, Pérosteck Balvéda et un drone dénommé Unaha-Closp descendent dans les galeries souterraines du Complexe de Commandement de la planète et partent à la recherche du Mental. C'est un véritable carnage qui les attend à leur arrivée : tous les Métamorphes qui travaillaient dans les souterrains de la planète ont été sauvagement massacrés par une troupe d'Idirans et de Medjels. Après des échanges de tirs nourris et un spectaculaire carambolage ferroviaire provoqué par un Idiran à l'agonie, le Mental, effrayé, sort enfin de sa cachette. Pourtant, la mission se solde par un véritable désastre : Yalson - enceinte de Horza - est tuée par un Idiran, puis écrasée par un wagon, les autres membres de la Libre Compagnie sont tous morts et Horza s'effondre sous les coups de poing féroces de Xoxarle, le dernier Idiran survivant. Seuls Perosteck Balvéda et le drone Unaha-Closp échappent à la mort. Ils ramènent le Mental et le corps de Horza à bord de la TAC, puis s'envolent pour le monde de la Culture.

Personnages

Les personnages sont regroupés par communauté et les communautés sont classées par ordre alphabétique :

Agents de la Culture

Drones

  • Amahain-Frolk, Ministre de la Sécurité de la Gérontocratie de Sorpen.
  • Egratin, Ministre de l'Extérieur de la Gérontocratie de Sorpen, assassiné par Horza.

Idirans

Jeu de Débâcle sur l'Orbitale de Vavatch

Libre Compagnie de Krayklin (LCK)

Métamorphes

Secte des Mangeurs

Jeu de Débâcle

Le jeu de « Débâcle » est un jeu de cartes amélioré qui ressemble plus ou moins au Poker et se joue traditionnellement à la Veille d'un Désastre, comme quelques heures avant la destruction de l'Orbitale de Vavatch par un vaisseau de la Culture. Les arbitres sont les Ishlorsinami, l'ethnie considérée comme la plus honnête et la moins corrompue de la galaxie.

Le jeu consiste à jouer des combinaisons de cartes et à miser des crédits ou des biens matériels. Par l'intermédiaire d'un champ électronique disposé tout autour de la table, les joueurs peuvent altérer les émotions d'un ou plusieurs partenaires en jouant certaines combinaisons de cartes, provoquant des sentiments de Peur, d'Angoisse, de Deséspoir, d'Espoir, d'Amour, de Paranoïa, d'Exaltation, etc. pour désorienter leurs adversaires. Les retombées perceptibles de ces combinaisons émotionnelles profitent aux « émotomanes », des spectateurs drogués aux émotions fortes.

Chaque joueur dispose de Vivants, des humanoïdes sortis de prisons ou volontaires. Chaque mise perdue au cours de la partie provoque la mort immédiate d'un Vivant. Le gagnant est le dernier joueur qui possède encore des Vivants. Un joueur peut mettre en jeu sa propre vie s'il veut poursuivre sans Vivant.

Commentaires thématiques

Souvenir de Phlébas

Le titre original du roman de Iain M. Banks, Consider Phlebas, est emprunté à un poème de T. S. Eliot : La terre vaine (The Waste Land). Un extrait de ce poème - datant du début du XXe siècle - est proposé dans les toutes premières pages du roman : le souvenir de la mort du marin phénicien Phlébas.

Le titre original tiré du poème fait une nouvelle apparition comme titre de l'ultime chapitre du roman : Considère Phlébas. Ce chapitre raconte le rapatriement de la dépouille mortelle du héros par l'agent de la Culture Pérosteck Balvéda. Le lecteur est ainsi conduit à faire un subtil parallèle entre la destinée tragique du marin phénicien du poème et la mort du Métamorphe dans le roman : c'est toute la thématique baroque du memento mori et de la vanitéqui transparaît en filigrane. Le sens des actions individuelles se perd dans les méandres incontrôlables de l'histoire des civilisations. Un individu peut-il avoir un impact réel sur le destin d'une civilisation ? Bora Horza Gobuchul aurait-il pu - à lui tout seul - faire perdre la guerre à la Culture ?

Iain M. Banks s'est d'ailleurs exprimé lui-même à ce sujet : « Une forme de guerre raconte l'histoire d'une grande guerre dont différents groupes ou individus tentent de modifier l'issue. Cependant, même lorsqu'ils sont capables d'intervenir sur le cours des événements, rien ne change vraiment. À la fin du roman, j'ai écrit une annexe qui explique ce qui s'est passé après la guerre pour essayer de poser la question suivante : « À quoi est-ce que tout cela a servi ? » J'imagine que cette approche est directement liée à ma propre réaction face au cliché SF du héros solitaire. Vous connaissez cette idée selon laquelle un simple individu pourrait déterminer la direction que prennent des civilisations entières. Une personne seule ne peut vraiment y arriver. Cela donne à réfléchir à ce qui serait arrivé si Jésus Christ, Karl Marx ou Charles Darwin n'avaient jamais existé. Nous n'en savons rien du tout. »

Omniprésence de la mort

Comme le souligne Gérard Klein dans sa préface : « Un spectre hante le texte. C'est celui de la mort. ». En effet, la mort rôde à chaque chapitre du livre, à l'occasion de chaque nouvelle aventure du héros.

Bora Horza Gobuchul est doublement confronté à la mort : il risque la mort à chacune de ses nouvelles missions et tue lui-même pour prendre la place de ses victimes. La mort est à la fois une menace ultime et une arme indispensable.

Au cours du roman, le héros est impliqué dans un nombre impressionnant de situations où il risque sa vie. Bora Horza Gobuchul

Au-delà de la mort individuelle, c'est bien la mort des civilisations qui est suggérée dans le roman. À la fin du roman, les protagonistes se retrouvent sur une « Planète des morts », une planète dont la population s'est autodétruite lors d'une guerre bactériologique et qui est devenue un sanctuaire à la mémoire des civilisations disparues. Lorsque le héros trouve une carte géographique de la planète Schar telle qu'elle était 11 000 ans plus tôt, il découvre une planète qui ressemble en tous points à la planète Terre, avec ses continents, ses vastes océans, ses paysages et climats variés, ses deux calottes glaciaires. C'est donc le fantôme inquiétant d'une lointaine civilisation terrienne qui semble hanter la fin du roman, une civilisation terrienne dont le souvenir même a disparu de la mémoire collective, ne faisant place qu'au néant d'une planète déserte. Plus tragique encore pour le héros du récit, Iain M. Banks suggère également la lente mais inéluctable disparition de la population des Métamorphes, de moins en moins nombreux, accusés de toutes les infamies par les autres races humanoïdes de l'univers. En arrivant sur la planète Schar, Bora Horza Gobuchul est doublement confronté au destin : celui de sa propre mort héroïque, mais désespérément inutile, et celui de sa propre race vouée à l'oubli.

Choc des civilisations

Le Métamorphe Bora Horza Gobuchul voue une haine tenace aux humanoïdes de la Culture. Tout au long du roman, il expose les raisons de son mépris en comparant la civilisation de la Culture à celle des Idirans.

Si Bora Horza Gobuchul oppose tous ces éléments, c'est toujours pour souligner son admiration pour la conception de la vie défendue par les Idirans. Pour Horza, ces créatures tripèdes se battent du côté de la vie biologique, du côté de la vraie vie, celle qui est « malodorante, désuète et faillible ». Le relativisme et la déliquescence des valeurs morales qui caractérisent d'après lui la société de la Culture - qu'il perçoit comme anarchique et décadente - sont à ses yeux la négation même du processus évolutionniste qui devrait être à l'œuvre dans toute civilisation : la distinction de valeurs individuelles mises au service de la communauté. Pire encore, la communauté de la Culture s'est dépossédée de sa propre destinée en confiant son avenir aux machines. Le héros du roman ne se bat pas contre une race ou un État, il lutte contre une idéologie, contre un choix de civilisation qu'il considère comme suicidaire et délétère.

Ces considérations, mêlées au biologisme défendu par le héros du roman, rappellent avec force les critiques du philosophe Friedrich Nietzsche à l'encontre de l'égalitarisme délétère des sociétés modernes, de la démocratie et du socialisme, distinguant finalement une morale des faibles et une morale des forts. C'est justement l'aspect dionysiaque de la vie que défend le héros du roman, quoi qu'il lui en coûte finalement.

Critiques

Références des éditions

Une forme de guerre, de Iain M. Banks, traduit de l'anglais par Hélène Collon, a connu différentes éditions françaises :

Notes et références

  1. Cf. la préface de Gérard Klein.
  2. There's a big war going on in Consider Phlebas, and various individuals and groups manage to influence its outcome. But even being able to do that doesn't ultimately change things very much. At the book's end, I have a section pointing this out by telling what happened after the war, which was an attempt to pose the question, 'What was it all for?' I guess this approach has to do with my reacting to the cliche of SF's 'lone protagonist.' You know, this idea that a single individual can determine the direction of entire civilizations. It's very, very hard for a lone person to do that. And it sets you thinking what différence, if any, it would have made if Jesus Christ, or Karl Marx or Charles Darwin had never been. We just don't know. Entretien publié en ligne sur un site allemand.
  3. Cf. Préface, p. 7.
  4. Pour ses arguments, voir La Culture#Comparaison Idirans / Culture
  5. Cf. p. 46.
  6. Citation disponible sur le site 42.
  7. Voir à propos des éditions françaises le site Index SF.