Travail de nuit

Vendeur d'oranges en Tanzanie.

Le travail de nuit est le travail (salarié ou non) effectué tout ou partie de la nuit.

C'est un travail source d'une pénibilité particulière (variant selon le métier et les tâches, mais aussi selon les individus, avec de probables prédispositions génétiques ou facteurs liés à l'habitude de ce type de travail, ou à des adaptations individuelles et familiales), et qui peut avoir des impacts sur la santé et la vie sociale des équipes, individus, couples et famille.

Dans la plupart des pays, il fait l'objet pour ces raisons d'une législation particulière.

Modalités

Plusieurs modalités de travail de nuit existent. La plus connue est nommée Trois Huit. L'expression travail posté désigne l'ensemble du cycle incluant les horaires de jour.

Trois huit

Le travail en Trois Huit (en fait 3×8), c'est-à-dire trois équipes se succédant chacune pour huit heures de travail permet de faire fonctionner les installations d'une usine 24 heures sur 24 par la succession de 3 équipes sur le même poste de travail.
Dans la plupart des cas, les équipes changent d'horaire chaque semaine. L'équipe qui faisait l'horaire de nuit durant la semaine A, fait le matin la semaine B tandis que l'équipe du matin passe à l'après-midi.

Exemple de cycle :

  1. Semaine 1 : 4 h - 12 h
  2. Semaine 2 : 12 h - 20 h
  3. Semaine 3 : 20 h - 4 h

Deux-douze

Le travail en deux douze consiste en une équipe de jour et une équipe de nuit travaillant chacune 12 heures. Il n'y a pas d'alternance, un ouvrier est soit de nuit soit de jour.

Il y a en fait deux équipes de nuit qui travaillent en alternance selon les jours :

Ce principe s'applique bien par exemple aux ateliers où le temps de changement d'équipe est long et où chaque ouvrier peut remplacer l'autre, chacun prenant ses pauses à son tour.

Si une journée ou une nuit de 12 heures sont très exigeant, ne travailler que de nuit ou que de jour demande moins d'adaptation que le 3x8. Ce rythme est par exemple très apprécié des personnes ayant une vie personnelle nocturne très active.

Rémunération

La rémunération change selon l'activité de l'entreprise. La convention collective des HCR (Hôtels, Cafés, Restaurants), permet aux employeurs de payer aux smic les travailleurs de nuits et tous ceux qui pratiquent le « trois huit ».

En France

Les heures de nuit sont généralement comprises entre 21 h et 5 h ou 6 h. La rémunération dépend de la convention collective et des accords d'entreprise (qui peuvent être plus favorables que la convention de branche).

Par exemple :

Il semblerait que les cadres au forfait jours ne soient pas exclus de cette majoration. En effet, le Code du travail exclut seulement les cadres dirigeants de la législation sur le travail de nuit.

La ministre du Travail Muriel Pénicaud souhaite modifier la réglementation sur le travail de nuit et présente un projet de loi reprenant un amendement à la loi Pacte repoussant le déclenchement du travail de nuit dans les commerces alimentaires à minuit, contre 21 heures auparavant.

Périmètre du travail en équipes dans l'industrie & les services

Les secteurs ou métiers concernés sont notamment les suivants :

Périmètre géographique du travail en équipes

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Périmètre législatif du travail en équipes

De 1919 à 1948, le travail de nuit a fait l'objet, sous l'égide de l'ONU et plus précisément de l'Organisation internationale du travail de conventions régissant les droits des travailleurs de nuit. Ces textes visent spécifiquement les personnes jeunes, les femmes ou des métiers spécifiques (certaines industrie devant tourner à feu continu, métiers particuliers tels qu'infirmier, boulanger).
Un texte plus général (n'abordant cependant pas les jeunes) a été signé en 1990.

Législation européenne

Outre une directive européenne générale sur l'aménagement du temps de travail, une directive « 2003/88/CE », plusieurs fois mise à jour) cadre « (…) certains aspects du travail de nuit, du travail posté et du rythme de travail(…) » et le temps de travail dans les pays de l'Union européenne. Intégrant « les principes de l'Organisation internationale du travail en matière d'aménagement du temps de travail, y compris ceux concernant le travail de nuit », elle limite le travail excessif de nuit, et fait un droit par défaut de ne pas travailler plus de 48 heures par semaine. La directive, pour des raisons de santé et de sécurité, vise notamment à prémunir les travailleurs d'un temps de travail trop long présumé cause majeure de stress, de dépression et de maladie. Cette directive considère que :

Cette directive définit

a) « d'une part, tout travailleur qui accomplit durant la période nocturne au moins trois heures de son temps de travail journalier accomplies normalement »; b) « d'autre part, tout travailleur qui est susceptible d'accomplir, durant la période nocturne, une certaine partie de son temps de travail annuel, définie selon le choix de l'État membre concerné »: i)« par la législation nationale, après consultation des partenaires sociaux, ou » ii) « par des conventions collectives ou accords conclus entre partenaires sociaux au niveau national ou régional »;

Temps de travail normal de nuit :

Santé :

« a) les travailleurs de nuit et les travailleurs postés bénéficient d'un niveau de protection en matière de sécurité et de santé, adapté à la nature de leur travail »(article 12 ); « b) les services ou moyens appropriés de protection et de prévention en matière de sécurité et de santé des travailleurs de nuit et des travailleurs postés soient équivalents à ceux applicables aux autres travailleurs et soient disponibles à tout moment »(article 12 ).

Protection des travailleurs de nuit par les États membres :

Des dérogations sont possibles dans certaines circonstances ("ex : « accident ou de risque d'accident imminent ») ou à certaines conditions et uniquement pour certaines professions autonomes (cadres dirigeants, travailleurs indépendants, main-d'œuvre familiale, travailleurs dans le domaine liturgique des églises et des communautés religieuses, certains cadres ou d'autres personnes ayant un pouvoir de décision autonome…) ou pour des activités caractérisées par la nécessité d'assurer la continuité du service ou de la production (liste dans l'article 17).

Législation française

Est considéré comme travailleur de nuit tout salarié - homme ou femme - qui accomplit, pendant la période de nuit (21 h - 6 h ou période fixée par accord) :

Une autre période de 9 heures consécutives, comprise entre 21 heures et 7 heures mais comprenant, en tout état de cause, l’intervalle compris entre 24 heures et 5 heures, peut être substituée à la période « 21 heures / 6 heures », par une convention ou un accord collectif étendu ou un accord d’entreprise ou d’établissement. À défaut d’accord et lorsque les caractéristiques particulières de l’activité de l’entreprise le justifient, cette substitution peut être autorisée par l’inspecteur du travail après consultation des délégués syndicaux et avis du comité d’entreprise ou des délégués du personnel s’ils existent. Le travail de nuit présente un certain nombre de spécificités, notamment en termes de conditions d’organisation et de garanties pour le travailleur de nuit.

Dans certains secteurs d’activité (production presse écrite, radio, télévision, production et exploitation cinématographique, spectacles vivants, discothèque), la période de travail de nuit est fixée entre 24 heures et 7 heures. Une autre période de travail de nuit peut être fixée par une convention ou un accord collectif de branche étendu, un accord d’entreprise ou d’établissement, à condition de comprendre l’intervalle 24 heures/5 heures.

Des dispositions spécifiques doivent contribuer à protéger les salariés travaillant de nuit :

Histoire et techniques

Hors du domaine militaire et des veilles de nuit, le travail de nuit apparaît en France dans l'industrie textile. Il suit l'installation des mule-jennys (machines de filage continues) inventées par Samuel Crompton et se développe de l'an IV à l'an XII. Il concerne alors tant des enfants de 11 à 13 ans que des adultes

Chez Delaitre, à l'Épine (près d'Itteville), en l'an IV, on compte 100 enfants "fournissant le travail de 1000 femmes, qui n'ont d'autre besogne que rattacher le fil quand il casse". Les frères Perier font travailler 600 garçons et filles de 11 à 13 ans dans une fabrique située à Amilly près de Montargis.

Les enfants sont logés. Les industriels sont persuadés de poursuivre la tradition charitable qui consiste à donner du travail aux orphelins.

Évolution du travail de nuit

Depuis 1950, le recours au travail posté, sous-tendant le travail de nuit, a connu une recrudescence considérable. Ce phénomène a eu lieu pour maintes raisons, notamment l’évolution technologique dans plusieurs secteurs tels que les télécommunications. Environ 15 à 20 % de la population travaillant dans les pays industrialisés sont impliqués dans des quarts de travail en rotation (ou travail posté).

En France

La part des travailleurs de nuit est en hausse depuis 1991, passant de 13 % à 15,4 % en 2012. Plus précisément c'est la catégorie des travailleurs de nuit habituels qui a fortement augmenté passant de 3,5 % à 7,4 % alors que la part des travailleurs de nuit occasionnels a légèrement baissé . Le travail de nuit touche davantage les hommes et les salariés de la fonction publique. Les effectifs les plus importants de travailleurs de nuit se trouvent parmi les conducteurs de véhicules ; l'armée, la police ou les pompiers ; les infirmiers et sages-femmes ; les aides-soignants ; les ouvriers qualifiés ; les agents d'entretien ; les techniciens et agents de maîtrise. Dans chacune de ces catégories plus de 100 000 personnes travaillent de nuit .

En Europe

La définition du travail de nuit peut varier selon les pays et la comparaison entre pays doit donc être considérée avec précaution. Les données d'Eurostat montrent une forte baisse du travail de nuit au Royaume-Uni entre 1992 et 2012 et une baisse plus modérée en Italie, en Belgique ou au Danemark. La proportion de travailleurs de nuit a en revanche augmenté aux Pays-Bas, en Espagne et en France .

Amérique du Nord

Selon le Bureau of Labor Statistics (BLS), il y a environ 15 millions d’Américains engagés en tant qu’employés de nuit. Par ailleurs, d’après Statistique Canada (StatCan), au moins 30 % de la population canadienne est impliquée dans cette situation aussi.

Impacts sur la santé humaine

Article détaillé : Effets du travail de nuit sur la santé humaine.

Le travail de nuit surtout s'il est posté dit "horaires atypiques" par l'INRS a des impacts (directs et indirects) sur la santé ; sur l'individu et souvent collatéralement sur son entourage.

Les problèmes reconnus par la médecine du travail sont :

La base de ces effets serait un dérèglement de l'accord entre les rythmes nycthéméraux et le système hormonal, empêchant le (re)calage de l'horloge biologique interne des individus sur le rythme naturel jour-nuit. L'exposition à la lumière artificielle la nuit modifie les heures de production de la mélatonine, ce qui, en cas d'exposition durable, peut conduire à divers troubles graves de la santé et du métabolisme.

Prévention

Un dépliant de sensibilisation aux effets sur la santé, sur la sécurité et sur la qualité de vie des travailleurs concernés par le travail de nuit et le travail posté a été publié par l'INRS. Des mesures de prévention sont préconisées pour en limiter les effets négatifs, notamment car une fois acquis, ces troubles persistent souvent, même après changement de poste de travail (de jour).

Études basées sur le modèle animal

Chez l'animal sauvage, les effets d'une exposition à la pollution lumineuse environnementale, sont difficiles à évaluer, mais les effets de l'exposition à un rythme jour/nuit décalé ou à une lumière constante la nuit ont expérimentalement été mis en évidence sur l'animal de laboratoire ; ainsi, par exemple :

Notes et références

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  3. Journal du droit social
  4. « Le gouvernement veut assouplir le travail de nuit dans le commerce alimentaire », sur LExpress.fr, 31 octobre 2019
  5. OIT, Origins and history. Ilo.org (OIT). Consulté 2012-06-02
  6. Directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil, du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail
  7. Directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail
  8. repris du Ministère du travail car il n'y a pas de droit d'auteur sur l'information administrative.
  9. Article L3122-31 du Code du Travail (voir sous section Définitions)
  10. articles R. 213-6 et R. 213-8-1 du Code du travail
  11. Art. L3163-2 du Code du travail
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Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

Vidéographie

Liens externes

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