Opérateur de Laplace-Beltrami

L'opérateur de Laplace-Beltrami est une généralisation de l'opérateur laplacien aux variétés riemanniennes. On part de la définition Δ = d i v   g r a d {\displaystyle \Delta =\mathrm {div} \ \mathrm {grad} } , et l'on est ramené à définir la divergence et le gradient dans le cadre riemannien.

Avertissement : Dans cet article, on utilise la convention de sommation d'Einstein. Même quand le signe somme n'est pas omis, on s'impose la discipline de ne sommer que par rapport à un indice se trouvant à la fois en positions inférieure et supérieure.

Divergence associée à une forme volume

Sur une variété différentielle M {\displaystyle M} orientable, la divergence est naturellement associée à une forme volume. Si ω {\displaystyle \omega } est une telle forme, toute autre forme de degré maximum s'écrit de façon unique f ω {\displaystyle f\omega } , où f {\displaystyle f} est une fonction. Cela s'applique à la dérivée de Lie de ω {\displaystyle \omega } par rapport à un champ de vecteurs X {\displaystyle X} . La divergence de X {\displaystyle X} (par rapport à ω {\displaystyle \omega } ) est l'unique fonction telle que L X ω = ( d i v ω X ) ω {\displaystyle {\mathcal {L}}_{X}\omega =(\mathrm {div} _{\omega }X)\omega } .

D'après la formule L X = d ∘ i X + i X ∘ d {\displaystyle {\mathcal {L}}_{X}=d\circ i_{X}+i_{X}\circ d} , on a L X ω = d ( i X ω ) {\displaystyle {\mathcal {L}}_{X}\omega =\mathrm {d} (i_{X}\omega )} . Donc, d'après la formule de Stokes, si X {\displaystyle X} est à support compact,

∫ M ( d i v ω X ) ω = ∫ M d ( i X ω ) = 0 {\displaystyle \int _{M}(\mathrm {div} _{\omega }X)\omega =\!\int _{M}\mathrm {d} (i_{X}\omega )=0}

Si ω {\displaystyle \omega } s'écrit en coordonnées locales θ d x 1 ∧ ⋯ ∧ d x n {\displaystyle \theta \mathrm {d} x^{1}\wedge \cdots \wedge \mathrm {d} x^{n}} , on a

L X ω = ( L X θ ) d x 1 ∧ ⋯ ∧ d x n + θ ∑ i = 1 n d x 1 ∧ ⋯ ∧ L X ( d x i ) ∧ ⋯ ∧ d x n {\displaystyle {\mathcal {L}}_{X}\omega =({\mathcal {L}}_{X}\theta )\mathrm {d} x^{1}\wedge \cdots \wedge \mathrm {d} x^{n}+\theta \sum _{i=1}^{n}\mathrm {d} x^{1}\wedge \cdots \wedge {\mathcal {L}}_{X}(\mathrm {d} x^{i})\wedge \cdots \wedge \mathrm {d} x^{n}}

(car L X {\displaystyle {\mathcal {L}}_{X}} est une dérivation).

Si X = ∑ i = 1 n X i ∂ ∂ x i {\displaystyle \textstyle X=\sum _{i=1}^{n}X^{i}{\frac {\partial }{\partial x^{i}}}} , on a L X d x i = d ( L X x i ) = d X i {\displaystyle {\mathcal {L}}_{X}\mathrm {d} x^{i}=\mathrm {d} ({\mathcal {L}}_{X}x^{i})=d\mathrm {X} ^{i}} , d'où l'on tire L X ω = ( L X θ ) d x 1 ∧ ⋯ ∧ d x n + θ ∑ i = 1 n ∂ X i ∂ x i d x 1 ∧ ⋯ ∧ d x n {\displaystyle \textstyle {\mathcal {L}}_{X}\omega =({\mathcal {L}}_{X}\theta )\mathrm {d} x^{1}\wedge \cdots \wedge \mathrm {d} x^{n}+\theta \sum _{i=1}^{n}{\frac {\partial X^{i}}{\partial x^{i}}}dx^{1}\wedge \cdots \wedge \mathrm {d} x^{n}} , et finalement, d i v ω X = d θ ( X ) θ + ∑ i = 1 n ∂ X i ∂ x i {\displaystyle \textstyle \mathrm {div} _{\omega }X={\frac {\mathrm {d} \theta (X)}{\theta }}+\sum _{i=1}^{n}{\frac {\partial X^{i}}{\partial x^{i}}}} .

Remarque sur l'orientabilité  : L'introduction d'une forme volume suppose la variété orientable. Mais si on change la forme volume ω {\displaystyle \omega } en son opposée, d i v ω X ) {\displaystyle \mathrm {div} _{\omega }X)} ne change pas. En fait, la divergence ne dépend que de la densité associée à ω {\displaystyle \omega } . Contrairement aux apparences, l'hypothèse d'orientabilté est inutile, on a en fait utilisé une orientation locale.

L'exemple le plus important est celui de la divergence définie par la forme volume canonique d'une métrique riemannienne.

d s 2   =   g i j ( x )   d x i d x j {\displaystyle \mathrm {d} s^{2}\ =\ g_{ij}(x)\ \mathrm {d} x^{i}\mathrm {d} x^{j}}

En coordonnées locales v g = det ( g i j ) d x 1 ∧ ⋯ ∧ d x n {\displaystyle v_{g}={\sqrt {\det(g_{ij})}}\mathrm {d} x^{1}\wedge \cdots \wedge \mathrm {d} x^{n}} . D'après la remarque qui précède, il n'est nullement nécessaire de supposer la variété orientable. Le déterminant des g i j {\displaystyle g_{ij}} est souvent noté g {\displaystyle g} , notamment par ceux qui écrivent d s 2 {\displaystyle \mathrm {d} s^{2}} la métrique riemannienne, cela ne porte pas trop à confusion.

Gradient associé à une métrique riemannienne

Le gradient d'une fonction (disons lisse) f {\displaystyle f} est l'unique champ de vecteurs, noté ∇ f {\displaystyle \nabla f} , tel que g ( X , ∇ f ) = d f ( X ) {\displaystyle g(X,\nabla f)=\mathrm {d} f(X)} pour tout champ de vecteurs X {\displaystyle X} . En coordonnées locales,

∇ f = ∑ i = 1 n ( ∑ j = 1 n g i j ∂ f ∂ x j ) ∂ ∂ x i {\displaystyle \nabla f=\sum _{i=1}^{n}\left(\sum _{j=1}^{n}g^{ij}{\frac {\partial f}{\partial x^{j}}}\right){\frac {\partial }{\partial x^{i}}}}

Ici, g i j ( x ) {\displaystyle g^{ij}(x)} est l'inverse du tenseur métrique, défini en coordonnées par

g i k ( x ) g k j ( x )   =   δ i j {\displaystyle g_{ik}(x)g^{kj}(x)\ =\ \delta _{i}^{j}}

où δ i j {\displaystyle \delta _{i}^{j}} est le symbole de Kronecker.

Définition et propriétés de base du laplacien

On définit l'opérateur de Laplace-Beltrami comme l'opérateur différentiel du second ordre Δ f = d i v ( ∇ f ) {\displaystyle \Delta f=\mathrm {div} (\nabla f)} .

En coordonnées locales,

Δ   =   1 g   ∂ i {\displaystyle \Delta \ =\ {\frac {1}{\sqrt {g}}}\ \partial _{i}\left}

Si f 1 {\displaystyle f_{1}} et f 2 {\displaystyle f_{2}} sont C 2 {\displaystyle C^{2}} et à support compact on a

∫ M f 1 Δ f 2 v g = − ∫ M g ( ∇ f 1 , ∇ f 2 ) v g = ∫ M f 2 Δ f 1 v g {\displaystyle \int _{M}f_{1}\Delta f_{2}v_{g}=-\int _{M}g(\nabla f_{1},\nabla f_{2})v_{g}=\int _{M}f_{2}\Delta f_{1}v_{g}}

Pour le voir, on remarque que si f {\displaystyle f} est une fonction et X {\displaystyle X} un champ de vecteurs,

d i v f X = f d i v X + d f ( X ) = f d i v X + g ( X , ∇ f ) {\displaystyle \mathrm {div} fX=f\mathrm {div} X+\mathrm {d} f(X)=f\mathrm {div} X+g(X,\nabla f)}

En appliquant cette relation à f = f 1 {\displaystyle f=f_{1}} et X = ∇ f 2 {\displaystyle X=\nabla f_{2}} , on obtient

∫ M ( f 1 d i v ∇ f 2 + g ( ∇ f 1 , ∇ f 2 ) ) v g = ∫ M d i v ( f 1 ∇ f 2 ) v g = 0 {\displaystyle \int _{M}{\bigl (}f_{1}\mathrm {div} \nabla f_{2}+g(\nabla f_{1},\nabla f_{2}){\bigr )}v_{g}=\int _{M}\mathrm {div} (f_{1}\nabla f_{2})v_{g}=0}

puisque d'après la formule de Stokes l'intégrale de la divergence d'un champ de vecteurs à support compact est nulle.

Cette formule exprime le fait que Δ {\displaystyle \Delta } est un opérateur formellement autoadjoint sur C ∞ ( M ) {\displaystyle C^{\infty }(M)} , par rapport au produit scalaire global, défini par

⟨ f 1 , f 2 ⟩ := ∫ M f 1 f 2 v g {\displaystyle \langle f_{1},f_{2}\rangle :=\int _{M}f_{1}f_{2}v_{g}}

(noter l'analogie avec les opérateurs symétriques en dimension finie.)

⟨ f , Δ f ⟩ = − ∫ M g ( ∇ f , ∇ f ) v g {\displaystyle \textstyle \langle f,\Delta f\rangle =-\int _{M}g(\nabla f,\nabla f)v_{g}} est négatif ou nul. L'opérateur − Δ {\displaystyle -\Delta } est positif (c'est la raison pour laquelle beaucoup de géomètres riemanniens définissent l'opérateur de Laplace comme − d i v   g r a d {\displaystyle -\mathrm {div~grad} } ). Enfin, si M {\displaystyle M} est une variété compacte sans bord, les seules fonctions à Laplacien nul sont les constantes (de même que les seules fonctions harmoniques sur un domaine compact de R n {\displaystyle \mathbb {R} ^{n}} , nulles au bord sont les constantes, la preuve est d'ailleurs la même).

Extensions

Article détaillé : Opérateurs laplaciens en géométrie riemannienne.

Il existe plusieurs extensions du laplacien quand on sort du cadre des fonctions numériques pour l'appliquer à des formes différentielles, des tenseurs ou de façon générale à des sections de fibrés vectoriels sur la variété riemannienne. Elles partagent certaines propriétés : le même symbole principal, le caractère elliptique. Et elles sont reliées les unes aux autres par des formules faisant intervenir la géométrie de la variété par sa courbure.

Annexes

Bibliographie

Articles connexes