Souffrance

Apparence déplacer vers la barre latérale masquer Si ce bandeau n'est plus pertinent, retirez-le. Cliquez ici pour en savoir plus.Si ce bandeau n'est plus pertinent, retirez-le. Cliquez ici pour en savoir plus.

Cet article ne cite pas suffisamment ses sources (août 2015).

Si vous disposez d'ouvrages ou d'articles de référence ou si vous connaissez des sites web de qualité traitant du thème abordé ici, merci de compléter l'article en donnant les références utiles à sa vérifiabilité et en les liant à la section « Notes et références ».

En pratique : Quelles sources sont attendues ? Comment ajouter mes sources ?

Masque tragique sur la façade du théâtre dramatique royal à Stockholm.

La souffrance, ou la douleur au sens large, est une expérience de désagrément et d'aversion liée à un dommage ou à une menace de dommage chez l'individu. La souffrance est l'élément fondamental qui constitue la valence négative des phénomènes affectifs.

La souffrance peut être physique ou mentale, selon qu'elle se rattache principalement à un processus somatique ou psychique dans un organisme. La douleur (comme sensation), la nausée, la détresse respiratoire, et la démangeaison sont des exemples de souffrance physique. L'anxiété, le deuil, la haine, l'ennui sont des exemples de souffrance mentale. L'intensité de la souffrance peut présenter tous les degrés, depuis l’anodin négligeable jusqu’à l’atroce insupportable. En même temps que l’intensité, deux autres facteurs sont souvent pris en considération, la durée et la fréquence d’occurrence. L'attitude des individus envers la souffrance peut varier énormément, selon la mesure où, estiment-ils, elle est légère ou sévère, évitable ou inévitable, utile ou inutile, méritée ou imméritée, choisie ou non voulue, acceptable ou inacceptable, de conséquences mineures ou graves.

Les mots douleur et souffrance peuvent prêter à confusion et demander une attention particulière :

Tous les individus souffrent au cours de leur vie, de diverses façons, et souvent dramatiquement. Aucun champ de l'activité humaine ne s'occupe du sujet de la souffrance dans son ensemble, mais plusieurs s’intéressent à sa nature ou à ses processus, à ses origines ou à ses causes, à sa signification ou à son importance, aux comportements personnels ou sociaux ou culturels qui y sont reliés, à ses remèdes, à sa gestion, à ses utilisations.

Éthique et philosophie

L'hédonisme, en tant que théorie éthique, affirme que le bon et le mauvais résident en définitive dans le plaisir et la douleur. Les épicuriens, quant à eux, mettent l'accent sur la prévention de la souffrance plus que sur la poursuite du plaisir, parce qu'ils trouvent que le plus grand bonheur consiste en un état de tranquillité (ataraxie), exempt de douleur et à l'abri des ennuis qu'entraîne la poursuite ou les conséquences du plaisir. Pour le stoïcisme, le plus grand bien réside dans la raison et la vertu, mais un tel idéal s'atteint pour l'âme à travers une sorte d'indifférence au plaisir et à la souffrance (apathie): c'est pourquoi cette doctrine est devenue synonyme de maîtrise de soi devant même les pires douleurs.

Jeremy Bentham a mis de l'avant l'utilitarisme hédoniste, une doctrine qui est devenue populaire en éthique, en politique et en économie. Bentham prétendait que l'action ou la politique la plus morale est celle qui a pour conséquence « le plus grand bonheur pour le plus grand nombre ». Il a proposé une méthode appelée le « felicific calculus », ou calcul hédonique, pour déterminer combien de plaisir ou de douleur résulterait de n'importe quelle action. John Stuart Mill a amélioré et contribué à répandre l'utilitarisme hédoniste. Karl Popper, dans La Société ouverte et ses ennemis, a proposé un utilitarisme négatif, qui donne la priorité à la réduction de la souffrance sur l'accroissement du bonheur quand il s'agit d'utilité. Il argumente qu'il n'y a pas de symétrie morale entre la souffrance et le bonheur, l'une appelant urgemment à l'aide tandis que l'autre n'exige pas avec une telle urgence qu'on améliore le bonheur d'une personne qui va bien de toute façon. Plusieurs utilitaristes, depuis Bentham, affirment que le statut moral d'un être tient à sa capacité de ressentir le plaisir et la souffrance: les agents moraux devraient donc tenir compte non seulement des intérêts des êtres humains mais aussi de ceux des animaux. Peter Singer, avec son livre La Libération animale et d'autres écrits, représente l'avant-garde de cette sorte d'utilitarisme.

Une autre doctrine reliée au soulagement de la souffrance est l'humanitarisme (voir aussi aide humanitaire).

Le pessimisme, ainsi que l'a professé Arthur Schopenhauer, considère ce monde comme le pire possible, comme rempli de souffrances qui empirent toujours et que nul ne peut arrêter. Schopenhauer recommande de trouver refuge dans des choses comme l'art, la philosophie, la perte de la volonté de vivre, et la tolérance envers ses compagnons de souffrance. Friedrich Nietzsche, d'abord influencé par Schopenhauer, a développé par la suite une tout autre attitude, exaltant la volonté de puissance, méprisant la faiblesse de la compassion ou de la pitié, et recommandant d'embrasser volontairement « l’éternel retour » des plus grandes souffrances.

Biologie, neurologie, psychologie

Article détaillé : Évolution de la souffrance. La neuro-imagerie a permis d’identifier les structures cérébrales impliquées dans la souffrance.La neuro-imagerie a permis d’identifier les structures cérébrales impliquées dans la souffrance.

La souffrance et le plaisir sont des affects respectivement positifs et négatifs, des tonalités hédoniques et émotionnelles ou valences que les psychologues identifient souvent comme la base dans notre vie émotionnelle. Ils constituent ensemble le système de récompense. La souffrance peut être un trait adaptatif et améliorer la capacité de survie d’un individu. Le rôle de la sélection naturelle dans l’apparition et l’évolution de la souffrance physique et mentale est primordial. Les souffrances mettent en garde contre les menaces, motivent l'adaptation (lutte ou de fuite, évasion) et renforcent négativement certains comportements (punition, phobie). Malgré son caractère fondamentalement perturbateur, la souffrance contribue à l'organisation du sens dans le monde et dans le psychisme d'un individu. À son tour, ce sens détermine comment les individus ou les sociétés s’organisent autour de la souffrance.

De nombreuses structures cérébrales et processus physiologiques sont impliqués dans la souffrance. Diverses hypothèses tentent de rendre compte de l'expérience de la souffrance. L'une d’elles, la théorie du chevauchement de la douleur suggère que la douleur physique et la douleur sociale, à savoir deux types radicalement différents de souffrances, partagent une base phénoménologique et neurologique commune. En effet, des observations en neuro-imagerie ont montré que le cortex cingulaire s’active quand l’individu souffre de détresse sociale ou de douleur physique.

Religion

La souffrance joue un rôle important dans la plupart des religions, relativement à des choses comme la consolation ou le réconfort, la conduite morale (ne fais de mal à personne, aide les affligés), le progrès spirituel (pénitence, ascétisme), et la destinée ultime (salut, damnation, enfer).

La douleur a une signification même pour les individus athées : « La douleur est une incisive figure du mal. Constant rappel de la fragilité morale de l’homme. L’idée de la maladie méritée, de la souffrance venant punir la conduite réprouvée d’un individu est encore profondément enracinée dans les consciences contemporaines ». Même chez les individus non religieux, la douleur peut être considérée comme la punition d’une faute commise.

Psychologie

Article détaillé : Souffrance psychologique.

Comme le reconnaissent certains psychologues lorsqu'un individu souffre psychiquement, c’est l’être tout entier, à savoir toutes les dimensions de son esprit, qui sont concernées. Au départ il s’agit souvent d’une idée, donc d’une raison précise qui à elle seule fait entrer dans l’engrenage de la souffrance. Puis tout l’univers psychique, le monde intérieur de la personne devient lui-même noir, laid, déprimant. L’ambiance de ce qui nous entoure devient en effet réellement noire simplement parce qu’elle trahit l’objet de ce qui nous agresse. De plus, ce mal-être qui accapare l’individu prend dans le même temps une forme presque physique en ce sens que l'individu ressent des sensations désagréables, pénibles, comme le cœur qui fait « mal », la sensation d’une boule dans le ventre, etc. Ainsi la souffrance s’étend à tous les aspects de la vie psychique de l’individu : les idées, le climat de son monde intérieur, et enfin au niveau de ses sensations internes (et c'est bien sur ces dernières que jouent les antidépresseurs).

La dépression, elle, est une source de souffrance a priori anormale car non justifiée par des raisons concrètes. La dépression a de particulier qu’une fois installée elle s’auto-alimente. En effet de même que l’insomniaque craint de ne pas s’endormir ce qui l’empêche effectivement de plonger dans le sommeil, de même le dépressif souffre de sa condition, a peur que son état se prolonge, et cette peur, cette simple idée, entretient bel et bien sa situation de souffrance intérieure. Il est question d'un cercle vicieux.

Bien que les dépressions puissent varier selon les individus, d'une manière générale les thérapeutes constatent que les dépressifs ont en quelque sorte découvert un monde, un univers de cauchemar, de mal-être et de laideur qui les rend malheureux et les obsède. Cet univers est fantasmagorique car créé par la personne en état de souffrance et est donc une vue tordue de la réalité, bien que pourtant bien réelle, voire plausible pour l'être, à tel point qu’il est souvent difficile d'en sortir, et que si le dépressif y parvient, les rechutes sont courantes.

Angoisses, par August Friedrich Albrecht Schenck (tableau réalisé vers 1878).

La question de l'existence de la souffrance chez les animaux reste un sujet de controverses. De nombreux auteurs modernes pensent cependant que ceux des animaux qui possèdent des structures cérébrales comparables à celles des êtres humains (cortex cérébral ou structures semblables) et qui montrent, sur le plan de la cognition, des capacités proches de celles des humains, doivent avoir des capacités de souffrance.

Différents types de souffrance

Les souffrances peuvent être physiques ou mentales. La liste des types de souffrances est longue et leur intensité peut aller de bénigne à une grande intensité.

Souffrances physiques Souffrances mentales

Lutte contre la souffrance

En médecine, les soins palliatifs servent surtout à réduire les dernières souffrances d'un malade. Les médicaments analgésiques, dont la morphine, sont fréquemment employés pour diminuer les souffrances physiques. Les souffrances psychiques et sociales sont également de plus en plus prises en charge. Enfin, il est maintenant reconnu qu'une souffrance spirituelle est également présente : « Elle est la souffrance générale qui correspond au sentiment douloureux d'être séparé, coupé de la source, de sa vitalité, de ses sens, de son humanité ».

Certains contemporains pensent que la souffrance peut et doit être totalement abolie par le biais de moyens techniques regroupés sous le nom d'ingénierie du paradis (paradise-engineering). Selon le manifeste de David Pearce « L’impératif Hédoniste » (de l’anglais The Hedonistic Imperative), la souffrance est le résultat évitable de l’évolution darwinienne. Pearce propose le remplacement de l'axe douleur / plaisir par des stimuli semblables à ceux qui pourraient être développés en robotique ou par des gradients de bonheur, grâce au génie génétique et d'autres techniques ou avancées scientifiques.

La psychologie hédoniste, la science affective, et les neurosciences affectives sont quelques-uns des domaines scientifiques émergents qui pourraient, dans les années à venir, concentrer leur attention sur le phénomène de la souffrance.

Références

  1. Karl Popper, La Société ouverte et ses ennemis - Tome 1 : l'ascendant de Platon, Éditions du Seuil, 1979, 257 p. (ISBN 978-2-02-005136-1), p. 239-240
  2. F. Nietzsche, Par-delà le bien et le mal – Prélude à une philosophie de l'avenir, section 225.
  3. (en) Giovanna Colombetti, « Appraising Valence », Journal of Consciousness Studies,‎ 2005, p. 103-126 (lire en ligne)
  4. (en) Naomi I. Eisenberger, Matthew D. Lieberman, « Why It Hurts to Be Left Out », Department of Psychology, Franz Hall, University of California, Los Angeles,‎ 2005 (lire en ligne)
  5. LE BRETON D., 1995, p. 82.
  6. LE BRETON D., 1995, p. 89-91.
  7. Saint Jean-Paul II - Lettre apostolique « Salvifici Doloris ».
  8. LE BRETON D., 1995, p.97-98.
  9. LE BRETON D., 1995, p. 100.
  10. LE BRETON D., 1995, p. 104-105.
  11. Georges Chapouthier, « La douleur : des animaux à l’homme », dans (sous la direction de T. Auffret Van Der Kemp et J. C. Nouët) Homme et animal : de la douleur à la cruauté, coll. « Le mouvement des savoirs », Éditions de l’Harmattan, Paris, 2008, p. 25-38.
  12. Tanguy Châtel, Vivants jusqu'à la mort. Accompagner la souffrance spirituelle en fin de vie, Albin Michel, 2013, p. 178.
  13. (en) David Pearce, « The Hedonistic Imperative: Table Of Contents », sur hedweb.com (consulté le 27 octobre 2016)
  14. (en) « Vanity Fair interview with David Pearce: interviewer Ingo Niermann, Photos Liz Johnson », sur hedweb.com (consulté le 27 octobre 2016)
  15. (en) « An information-theoretic perspective on life in Heaven », sur gradients.com (consulté le 27 octobre 2016)
  16. (en) Daniel Kahneman, Edward Diener et Norbert Schwarz, Well-Being : Foundations of Hedonic Psychology, Russell Sage Foundation, 8 juillet 1999, 608 p. (ISBN 978-1-61044-325-8, lire en ligne)

Voir aussi

Bibliographie

Articles connexes

Liens externes