Polynôme de Legendre

Polynômes de Legendre

En mathématiques et en physique théorique, les polynômes de Legendre constituent l'exemple le plus simple d'une suite de polynômes orthogonaux. Ce sont des solutions polynomiales P n ( x ) {\displaystyle P_{n}(x)} , sur le segment {\displaystyle } , de l'équation différentielle de Legendre :

d d x + n ( n + 1 ) P n ( x ) = 0 {\displaystyle {\frac {\mathrm {d} }{\mathrm {d} x}}\left+n(n+1)\,P_{n}(x)=0} ,

dans le cas particulier où le paramètre n est un entier naturel.

De façon équivalente, les polynômes de Legendre sont les fonctions propres de l'endomorphisme de R {\displaystyle \mathbb {R} } défini par :

P ↦ u ( P ) = d d x {\displaystyle P\mapsto u(P)={\frac {\mathrm {d} }{\mathrm {d} x}}\left} ,

pour les valeurs propres − n ( n + 1 ) ,   n ∈ N {\displaystyle -n(n+1),\ n\in \mathbb {N} } .

Ces polynômes orthogonaux ont de nombreuses applications tant en mathématiques, par exemple pour la décomposition d'une fonction en série de polynômes de Legendre, qu'en physique, où l'équation de Legendre apparaît naturellement lors de la résolution des équations de Laplace ou de Helmholtz en coordonnées sphériques.

Définitions et propriétés générales

Définition en tant que solution de l'équation de Legendre

On appelle équation de Legendre l'équation différentielle linéaire homogène d'ordre 2 :

d d x + α ( α + 1 ) y = 0 {\displaystyle {\frac {\mathrm {d} }{\mathrm {d} x}}\left+\alpha (\alpha +1)\,y=0} ,

avec en général α ∈ R {\displaystyle \alpha \in \mathbb {R} } . On trouve les solutions non nulles de cette équation sous forme de séries entières en utilisant la méthode de Frobenius. D'après le théorème de Fuchs, puisque les seuls points singuliers de cette équation sont 1 et –1, le rayon de convergence d'une telle série vaut au moins 1. Si α n'est pas entier, ce rayon est exactement égal à 1 car la série ne peut pas converger à la fois en 1 et en –1.

En revanche, si α est un entier naturel, une (et une seule) de ces séries entières converge sur et vaut 1 au point 1 (cette solution est alors polynomiale, de degré α et de même parité que cet entier).

On peut donc définir le polynôme de Legendre Pn (pour tout entier naturel n) comme l'unique solution définie en 1 et –1 du problème de Cauchy :

d d x + n ( n + 1 ) P n ( x ) = 0 , P n ( 1 ) = 1. {\displaystyle {\frac {\textrm {d}}{{\textrm {d}}x}}\left+n(n+1)\,P_{n}(x)=0,\qquad P_{n}(1)=1.}

Définition en tant que fonctions propres d'un endomorphisme

De façon plus abstraite, il est possible de définir les polynômes de Legendre Pn comme les fonctions propres pour les valeurs propres –n(n+ 1), avec n entier, de l'endomorphisme défini sur R {\displaystyle \mathbb {R} } :

P ∈ R ↦ u ( P ) = d d x {\displaystyle P\in \mathbb {R} \mapsto u(P)={\frac {\textrm {d}}{{\textrm {d}}x}}\left} .

Cette définition plus abstraite est intéressante notamment pour démontrer les propriétés d'orthogonalité des polynômes de Legendre (voir infra).

Fonction génératrice

On peut aussi définir cette suite de polynômes par sa série génératrice :

1 1 − 2 x z + z 2 = ∑ n = 0 ∞ P n ( x ) z n {\displaystyle {\frac {1}{\sqrt {1-2xz+z^{2}}}}=\sum _{n=0}^{\infty }P_{n}(x)\,z^{n}} .

Cette expression intervient notamment en physique, par exemple dans le développement à grande distance du potentiel électrostatique ou gravitationnel (développement multipolaire).

Si l'on considère qu'en général z est complexe, le calcul des coefficients de la série de Laurent donne alors :

P n ( x ) = 1 2 π i ∮ ( 1 − 2 x z + z 2 ) − 1 / 2 z − n − 1 d z {\displaystyle P_{n}(x)={\frac {1}{2\pi i}}\oint (1-2xz+z^{2})^{-1/2}\,z^{-n-1}\,\mathrm {d} z}

où le contour entoure l'origine et est pris dans le sens trigonométrique.

Il est possible de définir les polynômes de Legendre par cette fonction génératrice, comme les coefficients de l'expansion.

Autres définitions

Formule de récurrence de Bonnet

Cette formule permet rapidement d'obtenir l'expression du polynôme de Legendre d'ordre (n + 1) à partir de ceux d'ordres n et (n – 1).

Pour tout entier n ≥ 1 :

( n + 1 ) P n + 1 ( x ) = ( 2 n + 1 ) x P n ( x ) − n P n − 1 ( x ) {\displaystyle (n+1)\,P_{n+1}(x)=(2n+1)\,x\,P_{n}(x)-n\,P_{n-1}(x)}

avec P0(x) = 1 et P1(x) = x. Elle se démontre facilement à partir de la fonction génératrice.

Démonstration

En dérivant par rapport à la variable t la définition des polynômes de Legendre à partir de la fonction génératrice, il vient après réarrangement :

x − t 1 − 2 x t + t 2 = ( 1 − 2 x t + t 2 ) ∑ n = 1 ∞ n P n ( x ) t n − 1 . {\displaystyle {\frac {x-t}{\sqrt {1-2xt+t^{2}}}}=(1-2xt+t^{2})\sum _{n=1}^{\infty }nP_{n}(x)t^{n-1}.} .

En utilisant à nouveau 1 1 − 2 x t + t 2 = ∑ n = 0 ∞ P n ( x ) t n {\displaystyle {\frac {1}{\sqrt {1-2xt+t^{2}}}}=\sum _{n=0}^{\infty }P_{n}(x)t^{n}} , il vient

∑ n = 0 ∞ x P n ( x ) t n − ∑ n = 0 ∞ P n ( x ) t n + 1 = ∑ n = 0 ∞ ( n + 1 ) P n + 1 ( x ) t n − 2 ∑ n = 0 ∞ ( n + 1 ) x P n + 1 ( x ) t n + 1 + ∑ n = 0 ∞ ( n + 1 ) P n + 1 ( x ) t n + 2 . {\displaystyle \sum _{n=0}^{\infty }xP_{n}(x)t^{n}-\sum _{n=0}^{\infty }P_{n}(x)t^{n+1}=\sum _{n=0}^{\infty }(n+1)P_{n+1}(x)t^{n}-2\sum _{n=0}^{\infty }(n+1)xP_{n+1}(x)t^{n+1}+\sum _{n=0}^{\infty }(n+1)P_{n+1}(x)t^{n+2}.}

En identifiant alors les coefficients des termes de même puissance de t, il vient alors :

Orthogonalité

Les polynômes de Legendre sont aussi caractérisés — à normalisation près par la condition Pn(1) = 1 — par le fait que Pn est de degré n et pour tous entiers distincts m, n,

∫ − 1 1 P m ( x ) P n ( x ) d x = 0 {\displaystyle \int _{-1}^{1}P_{m}(x)P_{n}(x)\,\mathrm {d} x=0} .

Autrement dit, les polynômes de Legendre sont deux à deux orthogonaux par rapport au produit scalaire ⟨ ⋅ , ⋅ ⟩ {\displaystyle \langle \cdot ,\cdot \rangle } défini sur R {\displaystyle \mathbb {R} } par la relation :

⟨ f , g ⟩ = ∫ − 1 1 f ( x ) g ( x ) d x {\displaystyle \langle f,g\rangle =\int _{-1}^{1}f(x)g(x)\,\mathrm {d} x} . Démonstration

La définition même de Pn montre qu'il s'agit d'un vecteur propre pour la valeur propre –n(n + 1) de l'endomorphisme :

P ∈ R ↦ u ( P ) = d d x {\displaystyle P\in \mathbb {R} \mapsto u(P)={\frac {\textrm {d}}{{\textrm {d}}x}}\left} ,

Or cet endomorphisme est symétrique pour le produit scalaire précédent, puisqu'une intégration par parties montre que

∀ P , Q ∈ R ⟨ u ( P ) , Q ⟩ = ∫ − 1 + 1 u ( P ) ( x ) Q ( x ) d x = − ∫ − 1 + 1 ( 1 − x 2 ) P ′ ( x ) Q ′ ( x ) d x {\displaystyle \forall P,Q\in \mathbb {R} \quad \langle u(P),Q\rangle =\int _{-1}^{+1}u(P)(x)Q(x)\,\mathrm {d} x=-\int _{-1}^{+1}(1-x^{2})P'(x)Q'(x)\,\mathrm {d} x} et donc ⟨ u ( P ) , Q ⟩ = ⟨ P , u ( Q ) ⟩ {\displaystyle \langle u(P),Q\rangle =\langle P,u(Q)\rangle } .

Comme il s'agit de vecteurs propres associés à des valeurs propres distinctes, la famille des polynômes de Legendre est orthogonale.

Formule de Rodrigues

Article détaillé : Formule de Rodrigues.

Le polynôme Pn(x) peut également être défini par la formule de Rodrigues :

P n ( x ) = ( 1 2 n n ! ) d n d x n {\displaystyle P_{n}(x)=\left({\frac {1}{2^{n}n!}}\right){\frac {\mathrm {d} ^{n}}{\mathrm {d} x^{n}}}\!\left} .

On déduit cette égalité de la caractérisation précédente, en vérifiant d'une part (par intégrations par parties répétées) que d n d x n {\displaystyle {\frac {\mathrm {d} ^{n}}{\mathrm {d} x^{n}}}\!\left} est orthogonal à R n − 1 {\displaystyle \mathbb {R} _{n-1}} , et d'autre part (par la règle de Leibniz) que la valeur en x = 1 {\displaystyle x=1} de d n d x n {\displaystyle {\frac {\mathrm {d} ^{n}}{\mathrm {d} x^{n}}}\!\left} est 2 n n ! {\displaystyle 2^{n}n!\,} .

Définitions sous forme de somme

On définit ce polynôme de deux façons sous forme de somme :

P n ( x ) = 1 2 n ∑ k = 0 E ( n / 2 ) ( − 1 ) k ( n k ) ( 2 n − 2 k n ) x n − 2 k {\displaystyle P_{n}(x)={\frac {1}{2^{n}}}\sum _{k=0}^{E(n/2)}(-1)^{k}{\binom {n}{k}}{\binom {2n-2k}{n}}x^{n-2k}}

(on en déduit P 2 n ( 0 ) = 1 2 2 n ( − 1 ) n ( 2 n n ) {\displaystyle P_{2n}(0)={\frac {1}{2^{2n}}}(-1)^{n}{\binom {2n}{n}}\,} )

P n ( x ) = 1 2 n ∑ k = 0 n ( n k ) 2 ( x − 1 ) n − k ( x + 1 ) k {\displaystyle P_{n}(x)={\frac {1}{2^{n}}}\sum _{k=0}^{n}{\binom {n}{k}}^{2}(x-1)^{n-k}(x+1)^{k}}

où on a utilisé :

( n k ) = n ! ( n − k ) ! k ! {\displaystyle {\binom {n}{k}}={\frac {n!}{(n-k)!k!}}}

Quelques polynômes

Les onze premiers polynômes sont :

Les 20 premiers polynômes de Legendre

Propriétés

Degré

Le polynôme Pn est de degré n.

Coefficient dominant

Le coefficient dominant de Pn est ( 2 n ) ! 2 n ( n ! ) 2 {\displaystyle {\frac {(2n)!}{2^{n}(n!)^{2}}}} .

Base

Pour tout entier naturel N, la famille ( P n ) 0 ≤ n ≤ N {\displaystyle (P_{n})_{0\leq n\leq N}} étant une famille de polynômes à degrés étagés, elle est une base de l'espace vectoriel R N {\displaystyle \mathbb {R} _{N}} .

Parité

Le polynôme Pn a même parité que l'entier n. On peut exprimer cette propriété par :

P n ( − X ) = ( − 1 ) n P n ( X ) {\displaystyle P_{n}(-X)=(-1)^{n}P_{n}(X)}

(en particulier, P n ( − 1 ) = ( − 1 ) n {\displaystyle P_{n}(-1)=(-1)^{n}} et P 2 n + 1 ( 0 ) = 0 {\displaystyle P_{2n+1}(0)=0} ).

Norme

Le carré de la norme, dans L2(), est

‖ P n ‖ 2 = 2 2 n + 1 . {\displaystyle \|P_{n}\|^{2}={\frac {2}{2n+1}}.} Démonstration

Pour tout n ≥ 0, on définit les intégrales :

‖ P n ‖ 2 = ∫ − 1 1 P n ( x ) 2 d x = − 1 1 − ∫ − 1 1 2 x P n ( x ) P n ′ ( x ) d x . {\displaystyle \|P_{n}\|^{2}=\int _{-1}^{1}P_{n}(x)^{2}\,\mathrm {d} x=\left_{-1}^{1}-\int _{-1}^{1}2xP_{n}(x)P_{n}'(x)\,\mathrm {d} x.}

Or, de la formule de Rodrigues, on déduit :

x P n ′ ( x ) = P n − 1 ′ ( x ) + n P n ( x ) . {\displaystyle xP_{n}'(x)=P_{n-1}'(x)+nP_{n}(x).}

Ainsi :

‖ P n ‖ 2 = P n ( 1 ) 2 + P n ( − 1 ) 2 − 2 ∫ − 1 1 P n ( x ) d x . {\displaystyle \|P_{n}\|^{2}=P_{n}(1)^{2}+P_{n}(-1)^{2}-2\int _{-1}^{1}P_{n}(x)\left\,\mathrm {d} x.} ‖ P n ‖ 2 = 2 − 2 ∫ − 1 1 P n ( x ) P n − 1 ′ ( x ) d x − 2 n ∫ − 1 1 P n ( x ) 2 d x = 2 − 0 − 2 n ‖ P n ‖ 2 . {\displaystyle \|P_{n}\|^{2}=2-2\int _{-1}^{1}P_{n}(x)P_{n-1}'(x)\,\mathrm {d} x-2n\int _{-1}^{1}P_{n}(x)^{2}\,\mathrm {d} x=2-0-2n\|P_{n}\|^{2}.}

L'intégrale ∫ − 1 1 P n ( x ) P n − 1 ′ ( x ) d x {\textstyle \int _{-1}^{1}P_{n}(x)P_{n-1}'(x)\,\mathrm {d} x} est en effet nulle, car par construction, Pn est orthogonal à tout polynôme de Legendre de degré inférieur, or deg ⁡ ( P n − 1 ′ ) = n − 2 < n {\displaystyle \operatorname {deg} (P'_{n-1})=n-2<n} , ce qui permet de conclure.

Une autre démonstration part directement de la formule de Rodrigues

P n ( x ) = ( 1 2 n n ! ) d n d x n {\displaystyle P_{n}(x)=\left({\frac {1}{2^{n}n!}}\right){\frac {\mathrm {d} ^{n}}{\mathrm {d} x^{n}}}\!\left} .

En intégrant par parties à plusieurs reprises l'intégrale

∫ − 1 1 ( d n d x n ) 2 d x {\displaystyle \int _{-1}^{1}({\frac {\mathrm {d} ^{n}}{\mathrm {d} x^{n}}}\!\left)^{2}dx} ,

on trouve qu'elle est égale à

( 2 n ) ! ∫ − 1 1 ( 1 − x 2 ) n d x = 2 ( 2 n ) ! ∫ 0 1 ( 1 − x 2 ) n d x {\displaystyle (2n)!\int _{-1}^{1}(1-x^{2})^{n}\mathrm {d} x=2(2n)!\int _{0}^{1}(1-x^{2})^{n}\mathrm {d} x} .

En faisant le changement de variable x = cos ⁡ θ {\displaystyle x=\cos \theta } , cette intégrale devient 2 ( 2 n ) ! ∫ 0 π 2 ( sin ⁡ θ ) 2 n + 1 d θ , {\displaystyle 2(2n)!\int _{0}^{\frac {\pi }{2}}(\sin \theta )^{2n+1}\mathrm {d} \theta ,} qui est une intégrale de Wallis.

On en déduit ‖ P n ‖ 2 = ( 1 2 n n ! ) 2 × 2 ( 2 n ) ! × 1 2 n + 1 4 n ( n ! ) 2 ( 2 n ) ! = 2 2 n + 1 . {\displaystyle \|P_{n}\|^{2}=\left({\frac {1}{2^{n}n!}}\right)^{2}\times 2(2n)!\times {\frac {1}{2n+1}}{\frac {4^{n}(n!)^{2}}{(2n)!}}={\frac {2}{2n+1}}.}

Scindé à racines simples

Pour tout entier n ≥ 1, le polynôme Pn est scindé à racines simples, toutes ses racines appartenant à l'intervalle ]–1, 1. Les seules solutions physiquement acceptables, c'est-à-dire qui ne divergent pas pour x → ±1 sont alors celles pour lesquelles n est entier, donc les polynômes de Legendre.

Démonstration

En effet, en coordonnées sphériques (r, θ, φ) l'équation de Laplace s'écrit:

1 r 2 ∂ ∂ r ( r 2 ∂ f ∂ r ) + 1 r 2 sin ⁡ θ ∂ ∂ θ ( sin ⁡ θ ∂ f ∂ θ ) + 1 r 2 sin 2 ⁡ θ ∂ 2 f ∂ φ 2 = 0 {\displaystyle {\frac {1}{r^{2}}}{\frac {\partial }{\partial r}}\left(r^{2}{\frac {\partial f}{\partial r}}\right)+{\frac {1}{r^{2}\sin \theta }}{\frac {\partial }{\partial \theta }}\left(\sin \theta {\frac {\partial f}{\partial \theta }}\right)+{\frac {1}{r^{2}\sin ^{2}\theta }}{\frac {\partial ^{2}f}{\partial \varphi ^{2}}}=0} .

Dans le cas où le problème est tel que la solution ne dépend pas de l'angle d'azimut φ, et en recherchant donc une solution par la méthode de séparation des variables, soit de la forme f(r, θ) = A(r)B(θ) il vient par substitution :

1 r 2 d d r ( r 2 d A d r ) B ( θ ) + 1 r 2 sin ⁡ θ d d θ ( sin ⁡ θ d B d θ ) A ( r ) = 0 {\displaystyle {\frac {1}{r^{2}}}{\frac {d}{dr}}\left(r^{2}{\frac {dA}{dr}}\right)B(\theta )+{\frac {1}{r^{2}\sin \theta }}{\frac {d}{d\theta }}\left(\sin \theta {\frac {dB}{d\theta }}\right)A(r)=0} ,

soit en divisant membre à membre par le produit A(r)B(θ) :

1 A ( r ) r 2 d d r ( r 2 d A d r ) = − 1 B ( θ ) r 2 sin ⁡ θ d d θ ( sin ⁡ θ d B d θ ) {\displaystyle {\frac {1}{A(r)r^{2}}}{\frac {d}{dr}}\left(r^{2}{\frac {dA}{dr}}\right)=-{\frac {1}{B(\theta )r^{2}\sin \theta }}{\frac {d}{d\theta }}\left(\sin \theta {\frac {dB}{d\theta }}\right)} .

Comme on doit avoir égalité entre chacun des deux membres, dépendant de deux variables différentes, pour toutes les valeurs possible de ces dernières, chacun d'eux doit être égal à une constante, dite de séparation, qu'il est possible d'écrire sans perte de généralité sous la forme α(α + 1) avec α réel. Le changement de variable x = cos θ permet de mettre l'équation issue du second membre sous la forme d'une équation de Legendre. Toutefois en physique on cherche des solutions définies pour toutes les valeurs possibles de l'angle θ, soit en fait régulières en x = ±1, donc avec α = n, n entier, la partie angulaire de l'équation de Laplace se met donc bien sous la forme indiquée.

Décomposition en série de polynômes de Legendre

Décomposition d'une fonction holomorphe

Toute fonction f, holomorphe à l'intérieur d'une ellipse de foyers -1 et +1, peut s'écrire sous la forme d'une série qui converge uniformément sur tout compact à l'intérieur de l'ellipse :

f ( z ) = ∑ n = 0 ∞ λ n P n ( z ) {\displaystyle f(z)=\sum _{n=0}^{\infty }\lambda _{n}P_{n}(z)}

avec ∀ n ∈ N , λ n ∈ C . {\displaystyle \forall n\in \mathbb {N} ,\lambda _{n}\in \mathbb {C} .}

Décomposition d'une fonction lipschitzienne

On note P n ~ {\displaystyle {\tilde {P_{n}}}} le quotient du polynôme Pn par sa norme.

Soit f une application continue sur . Pour tout entier naturel n, on pose

c n ( f ) = ∫ − 1 1 f ( x ) P ~ n ( x ) d x , {\displaystyle c_{n}(f)=\int _{-1}^{1}f(x){\tilde {P}}_{n}(x)\,\mathrm {d} x,}

Alors la suite (cn(f)) est de carré sommable, et permet d'expliciter le projeté orthogonal de f sur R n {\displaystyle \mathbb {R} _{n}}  :

S n f = ∑ k = 0 n c k ( f ) P ~ k . {\displaystyle S_{n}f=\sum _{k=0}^{n}c_{k}(f){\tilde {P}}_{k}.}

On a de plus :

  1. ∀ x ∈ , S n f ( x ) = ∫ − 1 1 K n ( x , y ) f ( y ) d y {\displaystyle \forall x\in ,\;S_{n}f(x)=\int _{-1}^{1}K_{n}(x,\;y)f(y)\,\mathrm {d} y} , avec le noyau K n ( x , y ) = n + 1 2 P ~ n + 1 ( x ) P ~ n ( y ) − P ~ n + 1 ( y ) P ~ n ( x ) x − y   ; {\displaystyle K_{n}(x,\;y)={\frac {n+1}{2}}{\frac {{\tilde {P}}_{n+1}(x){\tilde {P}}_{n}(y)-{\tilde {P}}_{n+1}(y){\tilde {P}}_{n}(x)}{x-y}}\ ;}
  2. S n f ( x ) − f ( x ) = ∫ − 1 1 K n ( x , y ) ( f ( y ) − f ( x ) ) d y . {\displaystyle S_{n}f(x)-f(x)=\int _{-1}^{1}K_{n}(x,\;y)(f(y)-f(x))\,\mathrm {d} y.}

Supposons de plus que f est une fonction lipschitzienne. On a alors la propriété supplémentaire :

∀ x ∈ ] − 1 , 1 -1,1-1,1–1, 1, l'une des méthodes les plus populaires est la méthode de quadrature de Gauss-Legendre fondée sur les propriétés des polynômes de Legendre. Elle prend la forme :

∫ − 1 1 f ( x ) d x ≈ ∑ i = 1 n w i f ( x i ) {\displaystyle \int _{-1}^{1}f(x)\,\mathrm {d} x\approx \sum _{i=1}^{n}w_{i}f(x_{i})}

avec :

En particulier, la formule à l'ordre n est exacte pour toute fonction polynomiale de degré 2n – 1.

Applications en physique

Les polynômes de Legendre, tout comme ceux d'Hermite ou de Laguerre, apparaissent dans diverses branches de la physique ou du calcul numérique car ils permettent le calcul d'intégrales définies sans qu'il soit nécessaire de les évaluer analytiquement, à condition toutefois que par un changement de variable adéquat, on se place dans l'intervalle d'intégration .

Les polynômes de Legendre permettent de développer en série les fonctions du type (cette formule se déduit directement de la fonction génératrice) :

1 | r − r ′ | = 1 r 2 + r ′ 2 − 2 r r ′ cos ⁡ γ = ∑ ℓ = 0 ∞ r ′ ℓ r ℓ + 1 P ℓ ( cos ⁡ γ ) ,  avec  r > r ′ {\displaystyle {\frac {1}{\left|\mathbf {r} -\mathbf {r} ^{\prime }\right|}}={\frac {1}{\sqrt {r^{2}+r^{\prime 2}-2rr'\cos \gamma }}}=\sum _{\ell =0}^{\infty }{\frac {r^{\prime \ell }}{r^{\ell +1}}}P_{\ell }(\cos \gamma ),{\text{ avec }}r>r'}

où r {\displaystyle r} et r ′ {\displaystyle r'} sont les normes des vecteurs r {\displaystyle \mathbf {r} } et r ′ {\displaystyle \mathbf {r} ^{\prime }} , respectivement, et γ {\displaystyle \gamma } est l'angle entre ceux-ci. Un tel développement est utilisé par exemple dans l'étude du dipôle électrique ou de façon plus générale dans l'expression du champ électrique ou gravitationnel à grande distance d'une distribution continue de charge ou de masse (développement multipolaire).

Les polynômes de Legendre apparaissent également dans la résolution de l'équation de Laplace en électrostatique, Δ Φ ( r ) = 0 {\displaystyle \Delta \Phi (\mathbf {r} )=0} , pour le potentiel électrique Φ {\displaystyle \Phi } dans une région de l'espace vide de charges (en coordonnées sphériques) dans le cas d'un problème présentant une symétrie axiale (le potentiel Φ {\displaystyle \Phi } est alors indépendant de l'angle azimutal φ {\displaystyle \varphi } ), procédant par la méthode de séparation des variables. La solution de l'équation de Laplace se met alors sous la forme :

Φ ( r , θ ) = ∑ ℓ = 0 ∞ P ℓ ( cos ⁡ θ ) . {\displaystyle \Phi (r,\theta )=\sum _{\ell =0}^{\infty }\leftP_{\ell }(\cos \theta ).}

Notes et références

Notes

  1. Alors, sans perte de généralité, α ≥ − 1 / 2 {\displaystyle \alpha \geq -1/2} , puisque α ( α + 1 ) = β ( β + 1 ) {\displaystyle \alpha (\alpha +1)=\beta (\beta +1)} pour β = − α − 1 {\displaystyle \beta =-\alpha -1} .
  2. En effet, l'équation différentielle se met sous la forme y ″ + p ( x ) y ′ + q ( x ) y = 0 {\displaystyle y''+p(x)\,y'+q(x)\,y=0} , avec p ( x ) = − 2 x 1 − x 2 {\displaystyle p(x)={\frac {-2x}{1-x^{2}}}} et q ( x ) = α ( α + 1 ) 1 − x 2 {\displaystyle q(x)={\frac {\alpha (\alpha +1)}{1-x^{2}}}} .
  3. En effet, les coefficients a n {\displaystyle a_{n}} d'une telle série entière vérifient la relation de récurrence a n + 2 = n ( n + 1 ) − α ( α + 1 ) ( n + 1 ) ( n + 2 ) a n {\displaystyle a_{n+2}={\frac {n(n+1)-\alpha (\alpha +1)}{(n+1)(n+2)}}a_{n}} , or n ( n + 1 ) − α ( α + 1 ) ( n + 1 ) ( n + 2 ) = 1 − 2 n + O ( 1 n 2 ) {\displaystyle {\frac {n(n+1)-\alpha (\alpha +1)}{(n+1)(n+2)}}=1-{\frac {2}{n}}+O\left({\frac {1}{n^{2}}}\right)} donc d'après le critère de Gauss (corollaire de celui de Kummer), chacune des deux sommes A = ∑ k ∈ N a 2 k {\displaystyle A=\sum _{k\in \mathbb {N} }a_{2k}} et B = ∑ k ∈ N a 2 k + 1 {\displaystyle B=\sum _{k\in \mathbb {N} }a_{2k+1}} est infinie sauf si son premier terme est nul (auquel cas tous ses termes sont nuls), si bien que A {\displaystyle A} ou B {\displaystyle B} est infinie (puisqu'on a exclu la solution nulle).
  4. D'après la relation de récurrence précédente.
  5. Le cas plus général où l'on cherche, par séparation des variables, les solutions de la partie angulaire de l'équation de Laplace dépendant à la fois de θ et ϕ, permet d'introduire les polynômes associés de Legendre, étroitement liés aux harmoniques sphériques.

Références

  1. L'étude ci-dessous de cette équation constitue — aux notations près, le α de cette source désignant notre α(α + 1) — le problème 9.3 de Yves Leroyer et Patrice Tesson, Exercices et problèmes de mathématiques pour l'ingénieur : Rappels de cours, corrigés détaillés, méthodes, Dunod, 2009 (lire en ligne) (énoncé p. 225 et corrigé p. 233, 234 et 235).
  2. « Equation de Legendre », sur bibmath.net (consulté le 15 août 2022).
  3. Voir par exemple C. Bernardi, Y. Maday et F. Rapetti, Discrétisations variationnelles de problèmes aux limites elliptiques, Springer, 2004 (lire en ligne), p. 35.
  4. Démontré par exemple dans la question II.2.c du sujet de CAPES 1989 et dans Bernardi, Maday et Rapetti 2004, p. 36 (corollaire 2.7).
  5. (en) E. T. Whittaker et G. N. Watson, A Course of Modern Analysis, Cambridge et New York, Cambridge University Press and the MacMillan Company, 1943, p. 305-306.
  6. Murray R. Spiegel (en), Analyse de Fourier et application aux problèmes de valeurs aux limites : 205 exercices résolus, Série Schaum, 1987, 200 p. (ISBN 978-2-7042-1019-0), chap. 7 (« Les fonctions de Legendre et leurs applications »), p. 138-142.
  7. On trouvera une table pour les cinq premières formules dans (en) Eric W. Weisstein, « Legendre-Gauss quadrature », sur MathWorld.

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

Liens externes