Maurice Rajsfus

Maurice RajsfusMaurice Rajsfus à Orléans (maison des associations), en septembre 2005.Biographie
Naissance 9 avril 1928
10e arrondissement de Paris
Décès 13 juin 2020 (à 92 ans)
Antony
Sépulture Cimetière de Cachan
Nom de naissance Maurice Plocki
Nationalité française
Activités Journaliste, écrivain
Fratrie Jenny Plocki
Autres informations
Partis politiques Parti communiste français (1944-1946)
Parti communiste internationaliste (1946-1950)
Parti socialiste unifié
Membre de Syndicat national des journalistes

Maurice Rajsfus, pseudonyme de Maurice Plocki, né le 9 avril 1928 dans le 10e arrondissement de Paris et mort le 13 juin 2020 à Antony (Hauts-de-Seine), est un écrivain, journaliste et militant français.

Il est auteur de nombreux livres dans lesquels il a abordé les thèmes du génocide des juifs en France, de la police et des atteintes aux libertés. En 1994, il a cofondé l'Observatoire des libertés publiques,, qu'il préside.

Biographie

Né en 1928 dans le 10e arrondissement de Paris, Maurice Plocki — qui prendra comme pseudonyme le nom de sa mère — est le fils de NushimPlocki (né le 22 janvier 1892 à Radom en Pologne) et Riwka Rajsfus (Rajcfus) (née le 16 novembre 1900 à Dembow, en Pologne), Juifs polonais arrivés en France au début des années 1920. Ils ont été mariés par le maire d'Aubervilliers, Pierre Laval, « alors encore avocat pacifiste ». Ses parents gagnent alors leur vie comme marchands forains, vendant des bas et des chaussettes dans les villes de la banlieue Nord de Paris.

Rescapé de la rafle du Vél’ d'hiv’

En juillet 1942, alors qu'il a 14 ans, il est arrêté avec ses parents et sa sœur aînée, Eugénie/Jenny, 16 ans, lors de la rafle du Vélodrome d'Hiver par un policier « un temps voisin de palier . Lorsque, en 1988, Rajsfus tentera de l'approcher (« pour comprendre »), le retraité l'éconduira d'un brutal : « Ça ne m'intéresse pas ! » Il n'a cessé depuis d'incarner cette « police de Vichy au passé trop présent, sans remords et sans mémoire ». Maurice Rajsfus est relâché avec sa sœur à la suite d'un ordre aléatoire excluant les enfants juifs français de 14 à 16 ans de la rafle ; ses parents ne reviendront pas. Ils sont déportés par le Convoi No. 11, en date du 27 juillet 1942, de Drancy vers Auschwitz.

Au lendemain de la guerre, il est « "Jeune communiste" à 16 ans, et participant aux Brigades de travail en Yougoslavie, puis exclu à 18 ans pour "hitléro-trotskisme", militant de la IVe Internationale avant 1950, puis du groupe Socialisme ou barbarie avec Lefort et Castoriadis, mobilisant le mouvement des Auberges de jeunesse contre la guerre d'Algérie dès 1955 et président de Ras l'front de 1991 à 1999 ».

Créateur de l'Observatoire des libertés publiques

Un an après que, le 6 avril 1993, Makomé M’Bowolé a été tué,, d'« une balle dans la tête à bout touchant » alors qu'il était interrogé, menotté, au commissariat des Grandes Carrières (18e arrondissement de Paris), Maurice Rajsfus fonde l'Observatoire des libertés publiques, qui publie un bulletin mensuel, Que fait la police ?. Il y démontre par l’exhaustivité des faits que ces meurtres ne sont ni des dérapages fortuits ni des accidents, mais l’aboutissement d’une violence systémique et quotidienne, toujours exercée au nom du maintien de l’ordre public.

Pour lui, le lien entre passé et présent est constant, notamment dans la surveillance de la police : « Ils ont volé des années de vie à mes parents. Tous ont participé aux rafles quand ils étaient requis. Pratiquement pas un seul n’a démissionné. Si la police française ne s’était pas mise aux ordres, jamais il n’y aurait eu autant de dégâts. Il y a eu 250 000 déportés de France, dont 76 000 Juifs, les autres étant, pour l’essentiel, des communistes et des gaullistes… Et que dire de ce policier qui, rendant compte à la préfecture de sa mission, ose écrire, le 22 juillet : "Le Vél’ d’Hiv’ est évacué. Il restait 50 Juifs malades et des objets perdus, le tout a été transféré à Drancy" ».

Après 20 ans de recherches et près de 6 000 « faits divers » policiers relatés, Maurice Rajsfus met fin au bulletin Que fait la police ? en avril 2014.

Antisioniste

Définissant le sionisme comme un « projet présenté comme "généreux" par ses initiateurs », il considère qu'il « a rapidement dérivé en une entreprise également raciste ». En parallèle, il dénonce l'utilisation de l'accusation d'antisémitisme qui est, selon lui, devenue « une arme brandie contre tous ceux qui s’opposent au sionisme, idéologie active qui ne saurait souffrir la moindre critique ».

Il publie, en 1990, Palestine : chronique des événements courants, 1988-1989 et L'Ennemi intérieur : Israël-Palestine, livres dans lesquels il décrit Israël comme « une démocratie sous haute surveillance » et dénonce les exactions de l'armée israélienne.

Études et recherches

N'ayant longtemps eu que le certificat d’études, puisqu'il quitta le collège à 14 ans, Maurice Rajsfus a cependant passé un doctorat en sociologie en 1992.

Il a été à plusieurs reprises membre du jury des Big Brother Awards France, et a préfacé le livre Big Brother Awards. Les surveillants surveillés (2008). Toutefois, il n'a pas une formation académique dans le domaine de l'Histoire. Pierre Vidal-Naquet note dans sa préface du livre de Maurice Rajsfus consacré à l'Union générale des israélites de France (UGIF) que « Entre Maurice Rajsfus et moi, il y a, dois-je ajouter, une autre différence. Je suis, il n'est pas un "historien de profession" », et il estime qu'« Il y a parfois à discuter sur la façon dont Maurice Rajsfus aborde le matériel historique, mais "Messieurs les Historiens" − et je ne m'excepte pas du lot − auraient dû commencer ».

Décès

Maurice Rajsfus meurt le 13 juin 2020 à Antony. Les Éditions Libertalia, qui l'avaient édité, annoncent : « Maurice Rajsfus vient de nous quitter après un combat inégal de six semaines contre la maladie. Nous poursuivrons ses combats pour la justice et l'émancipation. Ami, ta rage n'est pas perdue ! ». Il est inhumé le 18 juin 2020 dans le cimetière communal de Cachan, en présence notamment, outre ses enfants Michelle et Marc et ses petites-filles, de l'adjoint au Logement de Paris, Ian Brossat, de l'ancien candidat du parti NPA (alors LCR) à l'élection présidentielle Olivier Besancenot, du journaliste David Dufresne ou encore de la maire de Cachan, Hélène de Comarmond.

Publications

Bibliographie

Notes et références

  1. David Dufresne, « Une pétition «contre la haine raciste de policiers armés». L'Observatoire des libertés publiques est l'auteur de l'appel », sur Libération.fr, 18 janvier 1999 (consulté le 31 janvier 2020)
  2. Observatoire des libertés publiques.
  3. Insee, « Fichier des personnes décédées », sur data.gouv.fr, juillet 2020 (consulté le 16 juillet 2020).
  4. Jean-Paul Salles, « Rajsfus Maurice (Plocki Maurice) », sur Le Maitron, 15 juin 2020 (consulté le 16 juillet 2020).
  5. Voir, Klarsfeld, 2012
  6. Pierre Marcelle, « Rage de raison », portrait de Maurice Rajsfus » dans Libération, 28 avril 2002.
  7. « Maurice Rajsfus ; la rafle du Vel d'hiv » , sur ina.fr, Patrice Gélinet, Les Jours du siècle, France Inter, 22 avril 1997 (consulté le 4 décembre 2013).
  8. Renaud Leblond, « Scènes de haine ordinaire à Paris 18e », sur L'Express, 15 avril 1993 (consulté le 8 novembre 2013).
  9. Patricia Tourancheau, « Avril 93, un mort au commissariat. Le policier Compain est jugé à Paris pour « homicide volontaire », sur liberation.fr, Libération, 12 février 1996 (consulté le 8 novembre 2013).
  10. L'inspecteur qui l'a tué fut condamné à huit ans de prison. Sources : Cathy Capvert, « Début du procès du policier qui avait tué le jeune Makomé », L'Humanité, 12 février 1996 ; « Procès Makomé : un « énorme gâchis », selon SOS Racisme », L'Humanité, 16 février 1996.
  11. « Présentation de l’Observatoire des libertés publiques », dans Que fait la police ?, Maurice Rajsfus et Alexis Violet, mai 1999.
  12. Jean Morawski, « Vel' d'Hiv. Vincennes, 1942 : cent « disparus », L'Humanité, 16 juillet 2002.
  13. « QUE FAIT LA POLICE ? » Blog Archive » QUE FAIT LA POLICE ? – Chronique anti-autoritaire de Maurice Rajsfus – 1er avril 2014 » (consulté le 29 novembre 2019)
  14. Citation dans Wikiquote.
  15. Maurice Rasjfus, Vous avez dit antisémitisme ?, 1er novembre 2000.
  16. L'Ennemi intérieur : Israël-Palestine, éditions de l'Atelier, 1987 (ISBN 978-2851390875) .
  17. « Entretien avec Maurice Rajsfus », Barricata, no 15,‎ mars 2007 (lire en ligne).
  18. Big Brother Awards. Les surveillants surveillés, éditions Zone
  19. Rajsfus 1980, p. 13
  20. Patrick Roger, « La mort de Maurice Rajsfus, recenseur de la « répression policière » », Le Monde, no 23462,‎ 16 juin 2020, p. 31 (lire en ligne).
  21. Disparition de l’écrivain et historien Maurice Rajsfus, Le Parisien avec AFP, 13 juin 2020.
  22. Lucile Métout, « Val-de-Marne : les adieux poings levés à Maurice Rajsfus, figure de l'antifascisme », sur Le Parisien, 18 juin 2020 (consulté le 19 juin 2020).
  23. Stéphane Dupont, Maurice Rajsfus. Retours d'Israël (compte-rendu), Politique étrangère, Année 1987, 52-4, p. 1021-1022

Annexes

Cinéma

Théâtre

Une adaptation théâtrale, La Rafle du Vél' d'Hiv, a été réalisée et jouée en 2004 par Philippe Ogouz d'après trois livres de Maurice Rajsfus : Opération étoile jaune (Le Cherche midi), Chroniques d'un survivant (Noésis), La Rafle du Vél' d'Hiv, (PUF).

Articles connexes

Liens externes