Daniel Bensaïd

Daniel BensaïdDaniel Bensaïd lors d'une conférence à Barcelone en avril 2008Biographie
Naissance 25 mars 1946
Toulouse
Décès 12 janvier 2010 (à 63 ans)
10e arrondissement de Paris (Paris, Île-de-France, France)
Sépulture Columbarium du Père-Lachaise
Nationalité française
Formation École normale supérieure de Saint-Cloud
Université Paris-Nanterre
Activités Philosophe, écrivain, instituteur, professeur d'université
Autres informations
A travaillé pour Université de Paris
Partis politiques Ligue communiste révolutionnaire
Nouveau Parti anticapitaliste
Influencé par Karl Marx, Walter Benjamin,
Charles Péguy
Œuvres principales
Walter Benjamin, sentinelle messianique
La Discordance des temps
Marx l'intempestif
Le Pari mélancolique
Éloge de la politique profane

Daniel Bensaïd, né le 25 mars 1946 à Toulouse et mort le 12 janvier 2010 à Paris 10e, est un philosophe et théoricien trotskiste français. Il fut un dirigeant historique de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) et de la Quatrième Internationale.

Biographie

Le père de Daniel Bensaïd est issu d'une famille de Juifs d'Algérie, originaire d'Oran ; sa mère, modiste, d'une famille ouvrière exilée à Blois après la Commune de Paris.

« Cercle ouvert » sur le Parti communiste français organisé par la Ligue communiste avec Daniel Bensaïd.

Il adhère aux Jeunesses communistes durant ses études secondaires à Toulouse en février 1962. Il est ensuite admis à l'École normale supérieure de Saint-Cloud et suit les cours de la faculté des lettres de Nanterre (créée en 1964) ; il milite alors dans la Jeunesse communiste révolutionnaire (JCR), aux côtés d'Alain Krivine. Il participe activement au mouvement de Mai 68, la JCR étant un des « groupuscules » les plus impliqués aux côtés du Mouvement du 22 mars de Daniel Cohn-Bendit et Jean-Pierre Duteuil.

En 1969, la JCR et le Parti communiste internationaliste fusionnent pour former la Ligue communiste ; il fait partie de son bureau politique avec, entre autres, Alain Krivine et Henri Weber.

Daniel Bensaïd rédige régulièrement des articles pour le périodique La gauche, mensuel québécois rattaché à la Quatrième Internationale. Il est membre de l'Institut international pour la recherche et la formation. Sa carrière de professeur de philosophie le mènera du lycée de Condé-sur-l'Escaut à l'université de Paris VIII.

Dans Une lente impatience, écrit en 2004, il revient sur les moments forts de sa quête philosophique et de son itinéraire militant. À partir de 2008, Daniel Bensaïd devient l'un des théoriciens du Nouveau Parti anticapitaliste, via des manifestes comme Penser Agir et Prenons parti pour un socialisme du XXIe siècle (ce dernier coécrit avec Olivier Besancenot).

Au printemps 1990, il apprend qu'il est atteint du Sida, qu'il a probablement contracté en 1988, et meurt des suites d'un cancer le 12 janvier 2010. Ses cendres sont déposées au columbarium du Père-Lachaise (case n°21 852).

Pensée philosophique

Walter Benjamin, source d'inspiration de Daniel Bensaïd pour penser le rapport au temps et à l'histoire.Karl Marx, auteur que Bensaïd appelle à dédogmatiser et à se réapproprier pour une action révolutionnaire adaptée au temps présent.

Ses apports proprement philosophiques résident dans ses réflexions sur la temporalité. Sa pensée à ce sujet s'élabore dans la période de confusion nouvelle inaugurée par la chute du Mur. Quatre livres sont les pivots de son évolution conceptuelle : Walter Benjamin, sentinelle messianique, publié en 1990 ; La Discordance des temps : essais sur les crises, les classes, l'histoire, publié en 1995 ; Marx l'intempestif : Grandeurs et misères d'une aventure critique, publié en 1995 également ; et Le Pari mélancolique, publié en 1997.

Juste après la chute du Mur, Daniel Bensaïd s'interroge : comment continuer la lutte quand l'horizon révolutionnaire s'éloigne ? En rupture avec la conception marxiste traditionnelle, il se met à explorer, à partir de Walter Benjamin, le concept d'une histoire ouverte sur des possibles non nécessairement inscrits dans les déterminations économiques et sociales. À dater de l'écriture de Walter Benjamin, sentinelle messianique, la pensée de Benjamin irriguera toutes ses conceptions ultérieures.

Avec La Discordance des temps, Bensaïd explore l'organisation des temporalités économiques et politiques pour tenter de penser le sens de l'histoire. Il examine l'articulation entre la lutte des classes et les autres formes de conflits (oppressions sexuelles, guerres, conflits ethniques, religieux). Dans Marx l'intempestif, il met au service de ces interrogations la puissance critique des textes classiques de Karl Marx, dont il propose une relecture débarrassée de leur habituelle interprétation finaliste.

Enfin, dans Le Pari mélancolique, il examine le dérèglement des conditions spatiales et temporelles (temps de la production, de la circulation, espaces de l'économie, de l'écologie, de l'information, etc.) qui déterminent la liberté d'agir des humains à chaque époque. Il souligne que les changements du temps présent appellent à redéfinir l'échelle et les rythmes de l'action politique.

Pensée politique et controverses

Le parti, opérateur stratégique, le pluripartisme

Pour Daniel Bensaïd, dans une lecture des apports propres de la pensée politique de Lénine, le leader bolchévik serait plus perspicace que Blum (ou que Marx) qui pensaient que le prolétariat devait s'organiser dans un seul parti. Selon lui, « Lénine fut bien l'un des premiers à concevoir la spécificité du champ politique comme un jeu de pouvoirs et d'antagonismes sociaux transfigurés, traduits dans un langage propre, plein de déplacements, de condensations et de lapsus révélateurs ». Cette conception laisserait ouvert un espace d'interrogation et d'action stratégiques (celui du comment) face aux contingences et aux incertitudes de l'histoire. La politique de Lénine serait « celle de la politique comme stratégie, de ses moments propices et de ses maillons faibles ». Le parti y acquiert une nouvelle fonction, qui n'est pas seulement celle du pédagogue et du propagandiste dessinée par le discours de Léon Blum au congrès de Tours : « Il devient opérateur stratégique, une sorte de boîte de vitesses et d'aiguilleur de la lutte des classes ». Le pluripartisme au sein même du mouvement ouvrier, à partir de la diversité des paris stratégiques générée dans les situations historiques concrètes, serait ainsi mieux concevable.

Critique du postmodernisme

Critique envers un marxisme trop dogmatique, Daniel Bensaïd reste toutefois très éloigné du post-modernisme (en particulier la pensée de John Holloway et de Toni Negri fondée sur l'appareil conceptuel deleuzien et foucaldien et inspiratrice des « nouveaux mouvements sociaux »), auquel il reproche ses implications philosophiques et politiques dans Les Irréductibles en 2001.

Sur l'interprétation de la révolution russe

Daniel Bensaïd s'oppose au Livre noir du communisme. Il reproche à l'ouvrage une « conception policière de l'histoire et de ses bavures » et le juge comme relevant du « prêt-à-penser dominant » :

Publications

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

Filmographie

Sa pensée et ses œuvres sont évoquées dans le film On est vivants (2015) de Carmen Castillo.

Liens externes

Notes et références

  1. Insee, « Acte de décès de Daniel Ben Saïd », sur MatchID
  2. BENSAÏD Daniel, dit Jébrac, dit Ségur, Jean-Paul Salles, biosoc.univ-paris1.fr
  3. Une lente impatience par Daniel Bensaïd (2004) aperçu disponible sur Google Livres
  4. Nanterre est alors un élément de l'Université de Paris, une annexe de la Sorbonne.
  5. « Daniel Bensaïd, un des fondateurs de la LCR, est mort », Le Monde,‎ 12 janvier 2010 (lire en ligne).
  6. C'est le titre qui est consacré au Livre noir dans Qui est le juge ? Pour en finir avec le tribunal de l'Histoire, Fayard, 1999, p. 175 et suiv.
  7. Daniel Bensaïd, « Communisme et stalinisme – Une réponse au Livre noir du communisme », supplément au n° 1755 de Rouge, novembre 1997.
  8. Association Daniel Bensaïd.