Association cultuelle

En France, la loi de Séparation des Églises et de l'État en 1905 institua en France (amputée à l'époque de l'Alsace et de la Moselle, où cette loi ne s'applique pas) des associations cultuelles dites aussi paroissiales, parfois, dans certaines Églises, presbytérales ou associations islamiques.

Ces associations sont des associations à but non lucratif selon la loi de 1901, mais avec certaines limitations : objet cultuel exclusivement (donc pas d'entraide), membres seulement individuels (pas d'association membre), nombre minimum de membres, etc., et certains avantages, notamment fiscaux.

Historique

La loi de 1905 a prévu ce type d'associations « pour subvenir aux frais, à l'entretien et à l'exercice public d'un culte » ; elles remplissent certaines des missions auparavant assurées, pour les quatre cultes reconnus, par les établissements publics du culte constitués dans le cadre de la loi du 18 germinal an X (8 avril 1802). Il fallait en effet une entité privée à qui attribuer la part des biens mis à disposition ou propriété d'un établissement public du culte, pour ce qui concerne exclusivement l'exercice public du culte, principalement les lieux de culte, et qui puisse assurer l'exercice du culte notamment sous l'aspect matériel (entretien des lieux de culte, réception des dons, rétribution et formation des ministres…).

Le catholicisme refusa de créer les associations cultuelles prévues par la loi de 1905 (il créera en 1924 des associations diocésaines). Le judaïsme garda ses structures passées. Les Églises protestantes constituèrent donc la très grande majorité des associations cultuelles, le modèle associatif présentant d'ailleurs des parallèles évidents avec leur système d'organisation traditionnel.

L'être et la mission de ces Églises ne s'épuisent cependant pas dans lesdites associations : elles ont dû constituer, en leur sein ou ensemble, d'autres associations uniquement de loi de 1901 qui leur permettent d'exercer notamment l'entraide et la mission.

Cependant, les associations cultuelles n'ont pas le monopole des activités cultuelles. L’article 4 de la loi du 2 janvier 1907 permet également aux associations de type loi de 1901 d’organiser le culte. Ainsi, il semblerait que 80 % des mouvements religieux sont constitués en association loi de 1901.

Régime juridique

Constitution d'une association cultuelle

Comme l'explique la circulaire publiée conjointement par les ministères de l'Intérieur et de l'Économie en juin 2010 à propos du support institutionnel de l'exercice du culte, la création d'une association cultuelle est d'abord soumise, comme toute autre association, à une simple obligation de déclaration. Il ne suffit toutefois pas que l'association se déclare « cultuelle » dans ses statuts, pour être aussitôt reconnue comme telle par l'administration compétente.

Si elle ne reçoit pas d'opposition du préfet dans un délai de quatre mois après avoir reçu une libéralité (donation ou legs), alors et alors seulement, une association peut considérer par défaut que son statut « cultuel » est validé par l'administration compétente. Si elle le désire, une association peut aussi interroger directement le préfet sur sa capacité à recevoir une libéralité sans être taxée par la suite. Le préfet lui accordera alors une attestation de non opposition, qui montrera alors publiquement que l'association est officiellement reconnue comme « cultuelle » et a le droit de recevoir des libéralités non taxables. Cette attestation est valable pendant cinq ans.

Conditions nécessaires

Pour prétendre à l'exonération des dons manuels et legs, une association qui s'annonce « cultuelle » doit remplir certaines conditions :

Avant que ne soient édictées ces conditions, la jurisprudence administrative avait déjà établi trois conditions à remplir pour qu'une association puisse être considérée comme cultuelle au sens de la loi du 9 décembre 1905 :

Contrôle préfectoral a posteriori

Selon la nouvelle rédaction de l'article 910 du code civil, l'acceptation de dons et legs n'est plus soumise à une autorisation préalable par arrêté préfectoral. Toute association cultuelle est autorisée à recevoir des dons et legs, avec obligation de déclaration à l'autorité administrative, qui conserve un pouvoir d'opposition a posteriori. Il en va de même pour l'application des articles 200 et 238 bis du code général des impôts, qui permet aux bienfaiteurs des associations cultuelles de déduire un pourcentage déterminé de leurs versements dans une certaine limite de leurs revenus.

Sont explicitement exclues de ces dispositions les « associations ou fondations dont les activités ou celles de leurs dirigeants sont visées à l'article 1er de la loi du 12 juin 2001 tendant à renforcer la prévention et la répression des mouvements sectaires portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales ». Cette réserve permet aux autorités publiques de garder un contrôle sur les associations qui risqueraient de troubler l'ordre public, comme le suggérait le rapport Machelon : « Cette « petite reconnaissance » constitue un levier important de la politique de lutte contre les dérives sectaires, dès lors notamment que la réserve d’ordre public permet de dénier la qualité d’association cultuelle à une association qui, pourtant, remplirait toutes les conditions posées par la loi de 1905. »

De plus, la jurisprudence du Conseil d'État soumettant la qualification d'association cultuelle au respect de conditions strictes, la deuxième édition de l'ouvrage Droit français des religions parue en 2013 souligne la difficulté pour les mouvements soupçonnés de dérives sectaires de l'obtenir : « Ces trois conditions étant cumulatives, l'approche retenue pas l'avis du 24 octobre 1997 reste très restrictive et rend très difficile, pour ne pas dire impossible, l'octroi du statut d'association cultuelle aux mouvements dits « sectaires ». Cet avis a confirmé en particulier l'approche abstraite de l'atteinte à l'ordre public retenue par le juge administratif, celui-ci ne subordonnant nullement la légalité des décisions de l'administration à l'existence de troubles effectifs, matériels, avérés à l'ordre public, mais se contentant de menaces à l'ordre public ou de risques pour l'ordre public, c'est-à-dire de troubles potentiels ». Et d'ajouter plus loin : « Les conditions fixées par l'avis du Conseil d'État du 24 octobre 1997 à la reconnaissance du statut d'association cultuelle étant très restrictives, seuls les Témoins de Jéhovah se sont vu reconnaître le statut d'association cultuelle par deux décisions précitées du Conseil d'État du 23 juin 2000. »

Associations cultuelles en France

Selon les données officielles du Premier ministre en 2021, il existe 5 000 associations cultuelles en France : entre 3 500 et 4 000 pour le culte protestant, 1 000 pour les Témoins de Jéhovah, une centaine également pour le culte juif et quelques dizaines respectivement pour les cultes musulman et orthodoxe. Une centaine d’associations diocésaines pour le culte catholique sont assimilées au statut d'associations cultuelles.

Statut accordé

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Statut refusé

Notes et références

  1. République Française, « Loi du 2 janvier 1907 concernant l'exercice public des cultes » (consulté le 19 février 2021).
  2. AIDF, « L'assurance association cultuelle », sur assurancemosquee.fr (consulté le 19 février 2021).
  3. Circulaire n° NOR/IOC/D/10/16585/C, 23 juin 2010, ministère de l'Intérieur et ministère de l'Économie, p. 9-10.
  4. Circulaire n° NOR/IOC/D/10/16585/C, 23 juin 2010, ministère de l'Intérieur et ministère de l'Économie, p. 12-15.
  5. Conseil d'État, Assemblée, avis du 24 octobre 1997, Association locale pour le culte des témoins de Jéhovah de Riom ; Conseil d'État, Section du contentieux, arrêt du 23 juin 2000, Ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie c/ Association locale pour le culte des témoins de Jéhovah de Clamecy.
  6. Conseil d’État, Section du contentieux, arrêt du 28 avril 2004, Association Cultuelle du Vajra Triomphant
  7. Circulaire du 20 décembre 1999 du ministère de l'Intérieur relative à la lutte contre les agissements répréhensibles des mouvements sectaires.
  8. Modifié notamment par l'ordonnance no 2005-856 du 28 juillet 2005 portant simplification du régime des libéralités consenties aux associations, fondations et congrégations, de certaines déclarations administratives incombant aux associations, et modification des obligations des associations et fondations relatives à leurs comptes annuels.
  9. Les relations des cultes avec les pouvoirs publics, MACHELON Jean-Pierre, La Documentation française, 2006, p. 40.
  10. Francis Messner, Pierre-Henri Prélot, Jean-Marie Woehrling, Droit français des religions, 2e édition, Paris : LexisNexis, 2013, p. 160.
  11. Francis Messner, Pierre-Henri Prélot, Jean-Marie Woehrling, Droit français des religions, 2e édition, Paris : LexisNexis, 2013, p. 161.
  12. Jean CASTEX (Premier ministre), « Projet de loi de finances rectificative pour 2021 » , sur Assemblée nationale, 2 juin 2021 (consulté le 25 juillet 2021), p. 106 ; Stéphanie Delmas, « Une réduction d’impôt de 75 % pour les dons aux associations cultuelles », Le Particulier,‎ 3 juin 2021 (lire en ligne).
  13. Raymond Massé et Jean Benoist, Convocations thérapeutiques du sacré, Paris, Karthala, coll. « Médecines du monde », 2002, 493 p. (ISBN 978-2-84586-266-1, présentation en ligne), p. 50.
  14. Émile Poulat, « L'association cultuelle n'est qu'un cadre », La Croix,‎ 16 juillet 1999 (lire en ligne).
  15. Georges-François Pottier, « 4 M associations 1800-1940 » , Archives départementales d'Indre-et-Loire, février 2011, p. 8.
  16. Régis Dericquebourg, Les antoinistes, Belgique, Brepols, 1993, 174 p. (ISBN 978-2-503-50325-7), p. 150-156.
  17. Dominique Kounkou, La religion, une anomalie républicaine ?, Paris/Budapest/Torino, L'Harmattan, 2003, 265 p. (ISBN 978-2-7475-4094-0, BNF 38973630), chap. 2 (« Les enfants dans la tourmente « sectaire » »), p. 98.
  18. « Affaire Église Évangélique Missionnaire et Salaun c. France »
  19. « Sectes… entre panique et confusion », Réforme, hors série de juin 2000. Bernard Blandre, « L'Église Évangélique de Pentecôte de Besançon exonérée », Mouvements Religieux, n° 246, revue éditée par l'Association d'étude et d'information sur les mouvements religieux, Sarreguemines, octobre 2000.
  20. Gérard Klein, Les sectes et l'ordre public, Presses Universitaires de Franche-Comté, 255 pages, 2005, p. 167 (ISBN 2-84867-109-2).
  21. « Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 04/02/2008, 293016 », sur legifrance.gouv.fr, 2008 (consulté le 3 octobre 2019).
  22. « Juridique », sur e-n-a.org, Église néo-apostolique (consulté le 3 octobre 2019).
  23. « Première Église du Christ, Scientiste, Paris », sur sciencechretienneparis1.com, Première église du Christ scientiste, 2015 (consulté le 3 octobre 2019).
  24. « Questions courantes », sur sciencechretienneparis2.com, Deuxième église du Christ scientiste (consulté le 3 octobre 2019).
  25. « La France compte 200 000 Témoins de Jéhovah », Aujourd'hui en France, 4 février 2008.
  26. Gérard GONZALEZ, « Les témoins de Jéhovah peuvent constituer des associations cultuelles », Revue Trimestrielle des Droits de l'Homme, n° 2001/48, p. 1208-1219.
  27. « Les Témoins de Jéhovah cherchent à se normaliser », La Croix, 29 mai 2011 ; « Le ministère de la justice perd une nouvelle manche face aux Témoins de Jéhovah », Le Monde, 30 mai 2011.
  28. « ASSOCIATION CULTUELLE SOKA DU BOUDDHISME DE NICHIREN »
  29. JO du 4 juillet 2009
  30. UNADFI, « Une secte sans gourou »
  31. « "La France condamnée par la Cour européenne des droits de l'Homme, à la demande de trois sectes" », sur "lexpress.fr".
  32. « "AFFAIRE ASSOCIATION CULTUELLE DU TEMPLE PYRAMIDE c. FRANCE" », sur "hudoc.echr.coe.int".
  33. «Le support institutionnel de l'exercice du culte», Circulaire n° NOR/IOC/D/10/16585/C, 23 juin 2010, ministère de l'Intérieur et ministère de l'Économie
  34. « Associations cultuelles », Direction de l'information légale et administrative (Premier ministre)
  35. « Les relations des cultes avec les pouvoirs publics », MACHELON Jean-Pierre, La Documentation française, 2006
  36. Émile Appolis. En marge de la Séparation : les associations culturelles schismatiques